La sourde oreille

Par Jonah Haddadle 18 juin 2017

Chaque jour, avec ma jolie femme toute attentive et dévouée, et avec mes enfants obéissants et angéliques, nous lisons la Bible en famille. À la fin de notre repas du soir, quand nous sommes tous rassemblés autour de la table, j’ouvre la Bible et je lis (avec autorité et passion) un texte biblique. Ma famille m’écoute, prête à recevoir tout ce que je dis. Ensuite, je pose quelques questions sur le contenu de ce que nous avons lu, et les enfants y répondent avec enthousiasme. Ensuite, nous prions les uns pour les autres et pour les besoins de notre église pendant que la gloire de Dieu se reflète sur nos visages.

Ce que je vous raconte est vrai (sauf pour quelques légers embellissements). Mais ce n’est pas la fin de l’histoire, parce que tout de suite après ces beaux moments en famille, plusieurs choses arrivent systématiquement : les enfants commencent à se bagarrer, puis, énervée par le bruit, Amy crie aux enfants d’arrêter, moi je provoque tout le monde par quelques commentaires sarcastiques et critiques, et le chaos s’ensuit. Voilà, la belle famille chrétienne de votre pasteur associé.

Mais plus sérieusement, peut-être que vous aussi, vous avez l’impression que le fait de suivre Jésus est plus facile à dire qu’à faire. Peut-être que vous avez l’impression que la parole de Dieu tombe dans l’oreille d’un sourd à chaque fois que vous la lisez. Dans Jacques chapitre 1, versets 19-27, l’apôtre Jacques parle à ceux qui ont du mal à faire le lien entre ce que Dieu leur dit et ce que Dieu attend d’eux. Jacques parle à ceux qui viennent à l’église mais qui ne savent pas pourquoi ils viennent à l’église. Il parle à ceux qui lisent la Bible sans la comprendre. Il s’adresse à ceux qui parlent sans avoir écouté, et qui écoutent sans mettre en pratique. Il veut corriger l’hypocrisie des chrétiens de son assemblée. En fin de compte, il veut tout simplement rappeler à ses frères l’importance de la parole de Dieu pour la pensée et pour l’action chrétienne.

Les hypocrites religieux n’écoutent pas

Dans ce texte, Jacques soulève l’hypocrisie des gens qui ne laissent pas la Parole de Dieu pénétrer dans leur vie. Il dénonce les tendances qui se trouvent chez nous tous. Jacques nous exhorte tous à nous examiner nous-mêmes, afin d’identifier nos tendances hypocrites et de rechercher implacablement une religion pure et sainte.

La première chose que Jacques constate dans ce texte, c’est que les hypocrites n’écoutent pas la parole de Dieu qui sauve. Les hypocrites religieux entendent la parole quand elle est lue, mais ils ne l’écoutent pas. Ils ne laissent pas la parole pénétrer dans leur cœur. Ils ne laissent pas la parole provoquer des changements. Globalement, ils résistent à la puissance de la parole de Dieu dans leur vie et au salut qu’elle leur offre.

Et quand on résiste à la parole, en réalité, on résiste à Jésus. En fait, Jacques nous fait comprendre le lien fort qui existe entre la parole et la personne et l’œuvre de Jésus-Christ. La parole (la loi de la liberté) pointe vers Jésus. En fait, le nom « Jésus » est la forme grecque du nom hébraïque Yeshua, qui veut dire « YHWH sauve », « Dieu sauve ». Jésus, le Sauveur, est venu dans le monde en tant que parole vivante. Jean chapitre 1 nous dit que Jésus (la Parole de Dieu) est venu dans le monde pour annoncer et pour donner le salut. Et la parole de notre sauveur est efficace. Luc chapitre 7.1-10 raconte l’histoire d’un centenier qui s’approchait de Jésus pour lui demander de guérir son serviteur. Et par la foi, le centenier a compris la puissance et le pouvoir de la parole de Jésus – « Dis un mot, et mon serviteur sera guéri. » La parole est efficace pour sauver. Jean chapitre 11 raconte comment Jésus a restauré la vie de Lazare par un simple mot : « Lazare, sors ! » Mais en même temps, Jésus nous rappelle que nous avons la responsabilité de répondre à sa parole salvatrice. En Matthieu chapitre 13, Jésus compare la parole du salut à des grains qui, parfois, tombent dans des endroits pierreux ou parmi des épines qui étouffent et qui dessèchent les jeunes pousses.

Quand on n’écoute pas la parole, cette parole ne peut jamais pénétrer dans notre cœur. Quand on entend sans comprendre, on résiste, en quelque sorte, à quelque chose qui a le pouvoir de sauver notre vie. Un hypocrite religieux, c’est quelqu’un qui prétend avoir compris le message de la grâce de la croix de Jésus Christ et qui prétend vivre dans l’obéissance à Jésus, mais qui n’est pas repentant et qui n’est pas dépendant du Seigneur.

Peut-être que vous avez déjà vu des livres d’illusions d’optique, où il faut fixer son regard sur une page remplie de motifs étranges et colorés, jusqu’à ce qu’on voit apparaître une image en 3D qui était cachée dans le motif. Il faut être discipliné et attentif pour apprendre à voir ce qui est caché en pleine vue. C’est comme ça avec la parole de Dieu. Tout le monde peut la lire, mais tout le monde ne verra pas forcément le sens de ce que Jésus a fait pour nous. De même, peut-être que vous avez passé du temps à l’étranger et que vous avez entendu une langue étrange sans rien comprendre. N’importe qui, qui a des oreilles fonctionnelles, peut facilement entendre les voix des gens qui parlent autour de lui. Mais seulement ceux qui connaissent la langue peuvent comprendre et participer à la conversation. C’est comme ça avec la parole de Dieu. Dieu nous donne la capacité d’écouter, et il attend de nous une réponse.

Nous devenons des hypocrites religieux quand nous prétendons avoir écouté la parole, tout en ignorant son message principal. Et donc, Jacques nous rappelle l’importance d’écouter la parole… de vraiment l’écouter.

Les hypocrites religieux ne se taisent pas

Mais Jacques constate aussi que les hypocrites religieux ne se taisent pas. Ils aiment le son de leur propre voix. Ils remplacent la parole de Dieu avec leur propre parole. C’est un danger pour nous tous. C’est un danger pour les enseignants de la Bible quand ils annoncent un message de la part de Dieu sans avoir pris le temps de lire ce que Dieu a révélé dans la Bible, et sans avoir pris le temps de prier ou de rechercher la sagesse d’autres chrétiens. Quand Jacques nous incite à être « lents à parler » au verset 19, et à « tenir sa langue en bride » au verset 26, ses conseils devraient être lus en corrélation avec son conseil d’écouter et de mettre en pratique la parole de Dieu. Proverbes, chapitre 18, verset 13, nous dit, « Celui qui répond avant d’avoir écouté, voilà bien pour lui stupidité et confusion ! »

Quand on est trop vite à parler, nos paroles peuvent devenir problématiques à plusieurs égards :

1. D’abord nos paroles deviennent susceptibles au mensonge. Si on est trop vite à parler, on peut facilement mentir sur Dieu et sur ses intentions pour le monde. Par exemple, il y a ceux qui étudient les Écritures juste pour trouver des prétendues contradictions et pour qu’ils puissent nier l’inspiration de la Bible. Il y a ceux qui ignorent le vrai message de la Bible afin d’enseigner leur propre version du plan de Dieu.

2. Mais ensuite, quand on est trop vite à parler, nos paroles deviennent incomplètes. Peut-être qu’on dit des bonnes choses, mais en n’étant pas complètement fidèle au témoignage de l’Écriture. Par exemple, on prêche les exigences de Dieu sans prêcher la grâce. Ou on prêche la grâce en oubliant de vivre selon la loi de Dieu qui nous fait du bien. Ce sont des paroles incomplètes.

3. Enfin, quand on est trop vite à parler, nos paroles peuvent manquer de douceur, de sagesse, et de grâce. Beaucoup de paroles, sans beaucoup de sagesse, ça peut blesser des gens. Les loups qui viennent parmi les brebis de l’église pour semer le trouble, sont souvent très raffinés et persuasifs dans leur discours. Mais le fruit de leur discours ne mène pas au bien de l’église.

Voyez-vous le lien entre le fait d’écouter correctement et le fait de parler correctement ? Ça se voit quand on joue au jeu du « téléphone arabe ». Plusieurs personnes forment un cercle, quelqu’un chuchote une simple phrase dans l’oreille de son voisin, et le message est passé d’une personne à l’autre jusqu’à ce qu’il revienne au début. Parfois le message revient intact. D’autres fois, il est légèrement différent. Et parfois, il n’a plus rien avoir avec l’original. Une phrase comme « il y a des beaux cieux au Mexique », une fois qu’elle est passée par plusieurs personnes différentes, devient « tu as des beaux yeux, tu m’excites. » Si on n’écoute pas correctement, on ne transmet pas correctement le sens de ce qu’on a entendu.

Nous les chrétiens, nous devons apprendre comment nous taire devant Dieu―comment écouter plus. Nous avons le droit de garder le silence. Par exemple, la loi française stipule que toute personne accusée d’une infraction pénale a le droit de « ne pas être forcée à témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable. » C’est-à-dire qu’on a le droit de garder le silence. Cette loi existe pour protéger les coupables pour qu’ils ne soient pas obligés de révéler trop de choses qui les enfonceraient encore plus dans le trou qu’ils ont eux-mêmes creusé. De la même façon, Dieu nous donne (à nous les pécheurs coupables) le droit de garder le silence. On n’est pas obligé de s’expliquer ou de se justifier. En revanche, on est obligé d’écouter Dieu. Ce n’est pas nos paroles qui nous sauvent, mais les siennes. Habaquq 2.20 nous dit :

« En revanche, l’Éternel est dans son saint temple. Que toute la terre fasse silence devant lui ! »

D’une manière similaire, le philosophe grec, Zénon, a dit :

« L'homme a deux oreilles et une seule langue, pour écouter deux fois plus qu'il ne parle. »

Les hypocrites religieux ne font pas

Plus on écoute la parole de Dieu, et moins on parle excessivement sans sagesse, le mieux ce sera pour nous tous. Selon Jacques, des oreilles qui comprennent la parole, et des langues qui parlent avec sagesse, sont le résultat de l’œuvre de Dieu en nous, quand l’évangile de grâce pénètre notre cœur et quand on se tourne vers Jésus dans la foi et dans la repentance. Pour Jacques, la loi, avec toutes ses exigences, existe pour nous rendre libre. Et cette liberté ne peut nous être donnée que par Jésus qui est l’accomplissement de cette loi. Jacques présuppose que les chrétiens à qui il écrit son épitre comprennent le lien entre le sacrifice de Jésus à la croix, et le système sacrificiel de la loi qui anticipe et qui prévoit le messie. Mais quand on est un hypocrite religieux, on ignore le vrai sens de cette loi.

Le but de Jacques dans ce texte n’est pas de remplacer la grâce par la loi. En revanche, il nous rappelle que celui qui ne valorise pas la loi de Dieu en la mettant en pratique, ne comprend pas la grâce vers laquelle elle pointe. Quand on est à l’écoute de Dieu et de tout le témoignage de l’Écriture, on est mieux équipé pour garder ses distances avec les pollutions du monde, avec ses priorités qui sont centrées sur la puissance et sur la richesse, et avec cette vie qui est focalisée sur soi.

Au lieu de ça, Dieu s’intéresse à l’amour pour les personnes vulnérables. Il s’intéresse à l’annonce de l’évangile. Il s’intéresse à l’humilité du cœur, et à la dépendance de lui. C’est ça la religion pure et sans tache dont Jacques parle au verset 27. Le même mot qui est traduit par « pure et sans tache », est un mot appliqué à la pureté et à la sainteté de Jésus dans d’autres textes du NT. La pureté de Jésus qui lui a permis de donner sa vie pour nous, est ensuite transmise aux chrétiens. Ce n’est pas nous qui accomplissons cette pureté, mais nous sommes appelés quand-même à garder la pureté (ou la sainteté) que Dieu nous donne par la foi.

Pour reprendre l’image de la pureté, nous sommes, par la grâce de Dieu, enlevés du chemin boueux du monde, nous sommes équipés de chaussures blanches (pures et sans taches), et nous sommes déposés sur un trottoir propre. Le Dieu qui nous a purifiés du péché par le sang de Jésus Christ, marche avec nous et nous appelle, face à la tentation, à éviter les flaques de boue, les crottes de chien et les caniveaux. Il nous aide à faire ce qu’on dit croire. Il débouche nos oreilles pour qu’on puisse entendre et recevoir la richesse de son évangile. Il débouche nos oreilles pour qu’on puisse mettre en pratique ce qu’on prétend croire.

Application

Jacques nous rappelle que l’écoute et la pratique de la parole sont liées de manière inextricable. Il nous avertit contre l’hypocrisie.

Ça fait longtemps que je n’ai pas cité Metallica ou d’autres groupes de Métal dans une prédication. Et donc, je m’excuse pour cette absence prolongée de références au Hard Rock. Je sais que ça vous manque à tous. Et donc, dans leur chanson « Holier Than Thou » (plus saint que toi), Metallica fait un constat, en regardant les gens ; c’est qu’il y a souvent une incohérence entre la parole et les actes (et surtout, pour les chrétiens, qui prétendent être les disciples de Jésus). Comme Jacques le fait, Metallica aussi nous rappelle que le monde nous regarde. Et souvent, ce qu’il voit, c’est l’hypocrisie―les oreilles d’un sourd, et une bouche trop prompte à parler.

Mais il faut comprendre quelque chose : l’hypocrisie se voit non seulement dans le fait de croire sans faire, mais également dans le fait de faire sans croire. C’est possible que vous veniez à l’église aujourd’hui avec une croyance en Jésus qui vous permet d’affirmer sans hésitation la vérité de sa parole, mais dès que vous quittez ce lieu de culte, le monde (avec toutes ses priorités) vous attire. Vous regardez dans le miroir et vous vous en allez et vous oubliez aussitôt comment vous êtes. Ou peut-être que vous êtes une bonne personne qui aime les autres, qui donne généreusement, et qui est un bon citoyen ; mais dès que vous venez à l’église vous résistez à l’appel de Dieu à vous humilier devant lui dans la foi. Ça aussi, c’est une forme d’hypocrisie. Comme je l’ai dit : l’hypocrisie se voit non seulement dans le fait de croire sans faire, mais également dans le fait de faire sans croire. Nous devons tous nous poser la question aujourd’hui : la parole de Dieu tombe-t-elle dans l’oreille d’un sourd ? La croix se présente-elle à des yeux aveugles ? Est-ce que je suis prêt à joindre ce que je crois avec ce que je fais ? Est-ce que ma parole, ma pensée, et ma pratique correspondent à ce dont témoigne l’Écriture ? Est-ce que j’ai bien compris le message de l’Écriture―le message de l’espérance de la grâce de Dieu par la foi en Jésus Christ qui nous sauve de la mort ? La parole de Dieu tombe-t-elle dans l’oreille d’un sourd à chaque fois que je la lis ?

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