Une relation privilégiée avec Dieu

Par Alexandre Sarranle 25 mars 2018

C’est tellement facile de vivre sa vie de tous les jours sans penser beaucoup à Dieu. Déjà, on a tous une vie bien remplie : entre l’école, les études ou le travail, la vie de famille, les tâches ménagères, la vie sociale, les loisirs, les cours de musique, les rendez-vous chez l’orthodontiste… on n’arrête pas ! Tout ça n’est pas vraiment nouveau. Ce qui est nouveau, c’est l’apparition des nouvelles technologies, et surtout le développement des médias numériques qui viennent dévorer le peu de temps qui nous restait.

Dans la voiture, on écoute la radio. Au bureau, on a la boite de réception de ses emails qui est ouverte en arrière-plan (comme c’était le cas au moment où je préparais cette prédication !). Pendant les pauses, il y a toujours quelques vidéos intéressantes à regarder sur YouTube. À la maison, souvent même pendant les repas, la télé est allumée. Aux toilettes, on consulte ses réseaux sociaux sur son smartphone. Même les journaux gratuits qu’on a commencé à distribuer il y a une vingtaine d’années à l’entrée des métros sont en crise parce que les gens ne les lisent plus ; ils préfèrent accorder leur attention au petit écran qu’ils ont toujours sur eux dans leur poche.

Facile donc de vivre sa vie de tous les jours… sans penser beaucoup à Dieu ! Finalement, on va penser à lui seulement quand on sera dans une situation vraiment difficile. Un peu comme un dernier recours. « Ah oui, demain j’ai mes partiels et je n’ai plus vraiment le temps de réviser… Seigneur, si tu pouvais m’aider ! » Bon, le but n’est pas de nous faire culpabiliser, mais de soulever ce problème ou cette tendance dans notre vie, qui est de ne pas accorder à Dieu toute l’attention qu’il mérite ! Parce que c’est justement la question qui est soulevée dans le texte qu’on va lire.

Nous avons naturellement tendance à négliger notre relation à Dieu, et il y a plein de facteurs différents qui peuvent contribuer à cela. Mais Dieu veut corriger cette tendance chez nous, pour notre bien, en nous rappelant à travers ce texte une réalité toute simple et pourtant bouleversante : c’est que nous avons la chance incroyable d’avoir un accès privilégié au Dieu de l’univers. Comment pourrions-nous négliger cette relation ? Si nous sommes chrétiens, nous avons accès à Dieu ! Nous sommes en contact avec lui. Nous sommes amis avec lui. Et le texte veut nous faire considérer deux choses pour nous aider à avoir plus d’intérêt pour Dieu : d’une part, un grand prix qui a été payé, et d’autre part, un grand prêtre qui nous porte sur son cœur.

Ce qui est en vue dans le texte, c’est toujours la confection, à l’époque de Moïse, d’un sanctuaire et de ses ustensiles, et maintenant aussi des vêtements des prêtres, tout cela selon le commandement et les instructions détaillées de Dieu. Et pour l’instant, rappelons-nous simplement que ce sanctuaire (appelé « tabernacle ») est censé représenter aux Israélites les mécanismes de la relation entre Dieu et les hommes.

1. Le grand prix de cette relation (38.21-31)

Premier point : un grand prix a été payé pour qu’on ait accès à Dieu. C’est vraiment l’idée que le texte veut communiquer, dans un premier temps, aux Israélites. Le tabernacle a coûté cher ! Pratiquement une tonne d’or (le poids de quatre pianos, à peu près), trois tonnes d’argent (le poids de deux Citroën Jumpy), deux tonnes de bronze. Tout cela a été contribué par les Israélites de la génération du désert. Le texte veut vraiment faire comprendre aux Israélites des générations futures que s’ils ont un tabernacle, et que s’il y a des ustensiles dans ce tabernacle, et que s’il y a un culte qui est rendu à Dieu dans le tabernacle, c’est parce que leurs ancêtres ont tous contribué ensemble à la construction de ces choses. Le tabernacle, il vaut cher, et le prix de ce tabernacle a été payé par leurs ancêtres.

Et bien sûr, le but en rappelant cela, c’est que les Israélites aient de la reconnaissance et de l’intérêt pour le tabernacle. En tant que parent, ça me fait penser à quelque chose que je dis parfois à mes enfants. « Pourquoi tu ne joues pas avec ton vélo plus souvent ? Il a coûté cher, ce vélo ! Est-ce que tu as travaillé ton instrument cette semaine ? Ils nous coûtent cher, tes cours de musique ! Fais attention en jouant dans le jardin de ne pas trouer ton pantalon. Il vaut cher, ce pantalon ! Ne laisse pas tes baskets dehors sous la pluie. Elles ont coûté cher, ces baskets ! Pourquoi tu ne vas pas plus souvent à la salle de sport ? Il nous coûte de l’argent ton abonnement ! Et cette Bible d’étude qu’on t’a offerte à Noël, tu la lis souvent ? Parce qu’elle nous a coûté cher, tu sais ! »

Il nous semble naturel que le prix qui a été payé pour quelque chose, si ce prix est élevé, doive susciter de l’intérêt pour cette chose. Et le texte est en train de dire aux Israélites qui ont vécu après l’époque de Moïse : « Hé, pourquoi vous négligez votre relation avec Dieu ? Il vaut cher, ce tabernacle que vos ancêtres ont payé. Il vaut cher, ce tabernacle que Dieu vous a donné pour matérialiser cette relation. En fait, votre relation avec Dieu vaut cher ! » Et comme on l’a souvent dit dans le cadre de cette série de prédications, cela est d’autant plus vrai pour nous aujourd’hui, qui n’avons plus le tabernacle de l’Ancien Testament, mais qui avons quelque chose de mieux et de plus cher encore, qui établit notre relation avec Dieu. Quelque chose, ou quelqu’un ! C’est Jésus le messie qui est venu pour accomplir de manière « plus grande et plus parfaite » tous les mécanismes qui étaient représentés par le tabernacle.

Comment a-t-il fait ? Eh bien, nous étions séparés de Dieu, comme tous les hommes et comme les Israélites, en raison de nos fautes, de notre égocentrisme, de notre cœur malade. Mais de la même façon que ce précieux tabernacle représentait aux Israélites le mécanisme de la grâce de Dieu qui recouvre les péchés et qui pardonne aux hommes par le moyen d’un sacrifice de substitution, Jésus lui aussi est venu offrir un sacrifice, mais cette fois, un sacrifice suffisant pour ôter le péché une fois pour toutes de la vie de tous les croyants de toute l’histoire. Il s’est offert lui-même en sacrifice, il s’est substitué à nous pour prendre sur lui le châtiment de nos fautes, pour nous en délivrer.

Ces jours-ci, on a beaucoup entendu ces termes de « sacrifice » et de « substitution » dans les médias. Ils ne parlaient pas de Jésus mais du Lieutenant-Colonel Arnaud Beltrame qui, il y a deux jours, s’est offert en sacrifice, en se substituant volontairement à une femme otage pour la délivrer des griffes d’un terroriste. Cette femme otage, j’imagine que pour le reste de sa vie, elle va se sentir redevable à l’officier Beltrame pour le grand prix qu’il a payé pour qu’elle soit sauvée. Le parallèle avec Jésus est saisissant, n’est-ce pas ? Sauf qu’en ce qui concerne Jésus, il faut ajouter une chose, c’est qu’il ne s’est pas substitué à des innocents ; il s’est substitué à des coupables. Il s’est substitué au terroriste, en fait !

« À peine mourrait-on pour un juste ; quelqu’un peut-être aurait le courage de mourir pour un homme qui est bon. Mais en ceci, Dieu prouve son amour envers nous : lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous. » (Rm 5.7-8)

Jésus a donné sa vie pour nous sauver alors que nous étions ses ennemis ; et il s’est sacrifié pour nous, non pas pour valider nos péchés, mais pour nous délivrer de nos péchés, en emportant nos péchés avec lui dans la tombe. Et il est ressuscité le troisième jour en vainqueur, et il nous offre maintenant une vie nouvelle avec lui. Par sa résurrection, Jésus a construit un nouveau tabernacle en quelque sorte, bien plus précieux que le premier, puisqu’en parlant de sa résurrection, Jésus a dit : « Détruisez ce temple, et en trois jours je le relèverai » (Jn 2.19). Vous voyez le grand prix qui a été payé, par quelqu’un d’autre, pour qu’on ait accès à Dieu ? Vous voyez le prix du tabernacle « plus grand et plus parfait » que Jésus a traversé pour nous avec son propre sang (Hé 9.11-12) ? « Vous avez été rachetés à grand prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps et dans votre esprit qui appartiennent à Dieu. » (1 Co 6.20) Mais ce n’est pas tout.

2. Le grand prêtre de cette relation (39.1-31)

Deuxième point : un grand prêtre nous porte en permanence sur son cœur. Après le « rapport financier » qui concerne la fabrication du tabernacle, le texte nous rapporte maintenant la confection des vêtements des prêtres. Il y a plusieurs choses à remarquer.

1/ D’abord, la place de ce passage dans le récit. La confection de ces vêtements vient à la fin, comme pour couronner tout le travail. C’est comme si tout était en place, le décor a été assemblé, et il ne nous manque plus que… les acteurs. Le texte souligne donc déjà la fonction importante, indispensable, des prêtres (soulignée d’autant plus par le refrain : « comme l’Éternel l’avait ordonné à Moïse »).

2/ Ensuite, il faut remarquer la prééminence du chef des prêtres, celui qu’on appelle le « grand prêtre », ou le « souverain sacrificateur ». Ses vêtements à lui sont plus compliqués, ils sont à part, différents, ils demandent une description plus longue et précise.

3/ Enfin, il faut remarquer la place centrale qu’occupe le pectoral dans la description de ces vêtements (au milieu des sept refrains). Le pectoral, c’est une pièce de tissu (25 x 25 cm) garnie de douze pierres précieuses que le grand prêtre devait porter sur la poitrine.

Ce que le texte veut rappeler aux Israélites, c’est tout simplement qu’ils ont un grand prêtre qui travaille à plein temps au tabernacle et dont la fonction consiste notamment à rappeler en permanence le souvenir des Israélites à Dieu, en portant les douze tribus sur son cœur. Et ce qui est vraiment intéressant, c’est que sur le pectoral, on n’a pas juste une grosse pierre précieuse qui représente le peuple d’Israël : on a douze pierres différentes attribuées aux douze tribus d’Israël. Le but, c’est que le peuple comprenne que l’attention que Dieu lui porte est une attention personnalisée. Dieu pense aux Israélites chacun selon sa tribu, et Dieu invente le pectoral comme symbole de cette attention qu’il leur porte, pour que les Israélites se souviennent que Dieu se souvient d’eux.

Le but, bien sûr, c’est encore une fois de stimuler l’intérêt des Israélites pour leur relation avec Dieu ! C’est un peu comme si je vous disais que j’étais un ami intime de quelqu’un pour qui vous, vous avez une énorme admiration. Disons Antoine Griezmann pour certains, Tim Keller pour d’autres, et peut-être Jean-Jacques Goldman pour d’autres encore. Bref, cette personne me considère comme son ami. Cette personne m’envoie des textos toutes les semaines, elle me laisse des messages sur mon répondeur, elle m’envoie des emails, elle m’invite à dîner chez elle… Oui, oui ! Mais imaginez que je ne réponde presque jamais à ses sollicitations. Vous seriez choqué(e) ! « Quoi ! Tu ne réponds pas aux textos d’Antoine Griezmann ! Tim Keller t’a envoyé douze emails pour te demander ce que tu pensais de son nouveau livre et tu n’as toujours pas répondu ! Jean-Jacques Goldman t’a laissé cinq messages sur ton répondeur pour t’inviter à dîner avec lui et à le conseiller sur son prochain album, et tu n’as pas encore dit oui ! »

Et le texte ici est en train de dire aux Israélites : « Hé, pourquoi vous négligez votre relation avec Dieu ? Votre tabernacle, il vaut cher. Mais en plus, Dieu il pense personnellement à vous, tout le temps. Il vous considère comme ses amis, il vous invite, il vous sollicite, il vous attend ! La preuve ? Regarde ce que porte le souverain sacrificateur sur sa poitrine. » Et vous savez où je veux en venir. Nous avons, nous aussi, aujourd’hui, si nous sommes chrétiens, un grand prêtre qui nous porte sur son cœur et qui parle de nous à Dieu dans le ciel. Jésus est ce grand prêtre.

Et vous savez pourquoi son service est « plus grand et plus parfait » que celui d’Aaron et de tous les autres souverains sacrificateurs de tout l’Ancien Testament ? Parce que Jésus est à la fois véritablement homme et véritablement Dieu. Il est donc le prêtre parfait, l’intermédiaire parfait, le médiateur parfait. Le Père ne peut pas faire autrement qu’être attentif, et même propice, aux demandes de son Fils. Ils sont en communion parfaite, avec le Saint-Esprit, un seul Dieu en trois personnes. Et ce Fils nous porte sur son cœur, et il garantit pour nous l’attention constante, personnelle, individuelle de Dieu. L’apôtre Paul affirme ceci : « Le Christ-Jésus est celui qui est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, et il intercède pour nous ! » (Rm 8.34).

Vous vous rendez compte du grand prix qui a été payé pour qu’on ait accès à Dieu, et du grand prêtre qui nous porte en permanence sur son cœur ?

Je me réveille le matin et j’ai un accès à Dieu qui est ouvert, et j’ai Dieu tout-puissant qui pense à moi, qui a veillé sur moi, même dans mon sommeil. Il me considère comme son ami, et même comme son enfant ! Je peux m’approcher librement, le lieu très saint est ouvert ! Et mon premier geste… est de regarder mon smartphone pour voir si j’ai eu des notifications dans la nuit. Ce smartphone que j’ai équipé d’une coque spéciale pour le protéger parce qu’il a coûté 600 euros. Tandis que ma relation à Dieu a coûté la vie de son Fils unique.

J’ai une demi-heure de pause au travail et la porte du temple de Dieu au ciel est ouverte, Jésus la tient, cette porte, de sa main cicatrisée. Et le Père pense à moi, son cher enfant racheté à un si grand prix. Et sa sainte et précieuse Parole s’adresse à moi, dans cette application gratuite que j’ai téléchargée sur mon fameux smartphone, et qui ne demande qu’un clic. Mais Candy Crush, ou Temple Run, c’est tellement plus passionnant !

Je rentre de l’école, ou du travail, j’ai un peu de temps avant l’heure du dîner. Le grand prêtre me porte sur son cœur, comme il l’a fait toute la journée. Je pourrais lui consacrer un peu de temps ; je n’ai pas encore pu lire ma Bible aujourd’hui, et dans la voiture, j’ai écouté un talk-show stupide à la radio alors que j’aurais pu prier ou écouter le podcast d’un prédicateur chrétien. Le Père céleste, le Créateur tout-puissant pense à moi depuis son trône, il me regarde, il m’attend. Et j’allume la télé parce que je m’ennuie.

Arrive dimanche. L’accès est grand ouvert, pour rendre un culte à Dieu, parce qu’un grand prix a été payé ; le sang de Jésus a coulé sur la croix exprès pour ça. Et un grand prêtre intercède pour son église dans le ciel ; Dieu est attentif aux louanges de son peuple, il prend plaisir à les entendre, son Saint-Esprit est présent dans l’assemblée, il distribue des bienfaits extraordinaires qui viennent directement du paradis, waouh ! Mais attends, laisse-moi réfléchir. Aller au culte une fois par semaine, c’est quand même beaucoup. Il y a aussi les matches de foot dans la vie, et les sorties à la piscine, et les anniversaires des copains.

Alors j’ai dit au début que le but, ce n’était pas de nous faire culpabiliser. J’avoue que je suis le premier concerné par le message de cette prédication. Et le grand prix qui a été payé, et l’intercession du grand prêtre, sont là aussi pour suppléer à cette faiblesse qui est la nôtre dans notre consécration à Dieu. Pour recouvrir cette faiblesse, pour nous la pardonner, pour compenser ce dont nous ne sommes pas capables. Et c’est là le mystérieux paradoxe de la grâce, n’est-ce pas ? Plus nous mesurons notre faiblesse, plus nous apprécions ce que Dieu a fait pour nous. Plus nous apprécions ce que Dieu a fait pour nous, plus nous voulons le suivre et nous consacrer à lui. Plus nous voulons suivre Dieu et nous consacrer à lui, plus nous mesurons notre faiblesse ! Et c’est cette spirale curieuse qui est en fait la recette de la vie chrétienne et du progrès dans la foi, et qui permet à Christ de croître en nous, et à nous de diminuer (Jn 3.30).

Rappelons-nous simplement, aujourd’hui, que si nous sommes chrétiens, si nous plaçons notre confiance en Jésus, nous avons la chance incroyable d’avoir un accès privilégié au Dieu de l’univers. Et c’est aussi ce que l’auteur de l’épître aux Hébreux veut que nous retenions, quand il nous dit :

« Ainsi donc, frères, nous avons l’assurance d’un libre accès au sanctuaire par le sang de Jésus, accès que Jésus a inauguré pour nous comme un chemin nouveau et vivant au travers du voile, c’est-à-dire de sa chair [quel grand prix !] ; et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu [quel grand prêtre !]. Approchons-nous donc d’un cœur sincère, avec une foi pleine et entière, le cœur purifié d’une mauvaise conscience et le corps lavé d’une eau pure. Confessons notre espérance sans fléchir, car celui qui a fait la promesse est fidèle. Veillons les uns sur les autres pour nous inciter à l’amour et aux œuvres bonnes. N’abandonnons pas notre assemblée, comme c’est la coutume de quelques-uns, mais exhortons-nous mutuellement, et cela d’autant plus que vous voyez le Jour s’approcher. » (Hé 10.19-25)

(Photo by Priscilla Du Preez on Unsplash)

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