Peut-on s'affranchir de Dieu ?

Par Alexandre Sarranle 7 octobre 2018

Est-ce que vous pensez que notre président Emmanuel Macron est hors d’atteinte de Dieu ? Sérieusement : est-ce que vous pensez que Dieu pourrait faire en sorte, par exemple, qu’Emmanuel Macron tombe sur le site internet de notre église un jour (un jour où il n’a pas grand-chose à faire dans son bureau à l’Élysée), et qu’il se mette à écouter l’enregistrement de cette prédication, et qu’en écoutant cette prédication, il devienne convaincu de la véracité du message de l’Évangile, qui concerne la personne et l’œuvre de Jésus-Christ ? Et que la trajectoire de sa vie en soit radicalement changée ? Est-ce que c’est possible ?

La plupart d’entre nous avons tendance à ricaner un peu devant un tel scénario. Emmanuel Macron… comme Donald Trump, Vladimir Poutine, ou Xi Jinping, ou encore Katy Perry, Lionel Messi, Johnny Depp, Brigitte Bardot, Cyril Hanouna, David Guetta… ils appartiennent à un autre monde que nous ! Ils s’en fichent de Dieu, et ils ne sont pas prêts de s’intéresser à ces choses, surtout qu’ils sont puissants, riches et célèbres, ils ont beaucoup d’influence, on les respecte, on les admire, et on a l’impression qu’ils n’ont besoin de rien ni de personne. Ce n’est pas demain la veille qu’ils vont rencontrer Dieu… Mais bizarrement, qu’est-ce qu’on aimerait être à leur place !

En fait, ces gens puissants et célèbres nous renvoient à notre propre orgueil. Il y a une part de nous à qui ça plairait beaucoup, si on se baladait dans la rue et que les gens se retournaient sur notre passage, et qu’on nous demande notre autographe, ou un selfie. Le jour où j’aurai une page Wikipédia à mon nom, le jour où je ferai un concert devant trois mille personnes, le jour où je serai nommé ministre d’un gouvernement, le jour où je serai recruté par une grande équipe de Ligue 1, le jour où j’aurai un million d’euros dans mon compte en banque, enfin ce sera la consécration ! Au fond, on aimerait faire partie de cet autre monde, n’est-ce pas, où on serait un peu, avouons-le… un peu comme des dieux !

Est-ce qu’il y a quelque chose qui cloche dans ce désir de puissance et d’autonomie ? Oui, il y a quelque chose qui cloche, et c’est ce qu’on va voir dans le passage d’aujourd’hui, qui est le témoignage de quelqu’un qui était extrêmement riche et puissant, qui n’avait besoin de rien ni de personne, dont beaucoup de croyants pensaient qu’il était hors d’atteinte de Dieu, et à qui Dieu pourtant a ramené les pieds sur terre. Et la moralité de ce passage est la suivante, et elle est destinée à corriger notre orgueil : il n’y a personne de si puissant que Dieu ne puisse l’abaisser… mais il n’y a personne non plus de si faible que Dieu ne puisse le relever. Cette réalité doit informer notre perception du monde, mais aussi de notre propre vie et de nos aspirations. Lisons le texte. L’action se déroule il y a 2500 ans environ, à Babylone, où de nombreux Israélites vivent en exil après l’invasion de leur pays.

Notre orgueil : un portrait

La première chose qu’il faut remarquer dans ce texte, c’est la description qui nous est faite de la grandeur de Neboukadnetsar. Il est prétendument roi de toute la terre (3.31) ; il vivait tranquille et heureux dans son palais (4.1) ; et son royaume est représenté comme un arbre immense qui fournit un abri et de la nourriture à tout le monde (4.9). Vous imaginez la puissance de cet homme ? Mais surtout, la cime de cet arbre « atteignait le ciel » (ou « les cieux », shamayin, 4.8, 17), ce qui n’est pas du tout une expression anodine.

Il faut se rappeler que Babylone, c’est l’endroit où, bien des siècles plus tôt, vers le début de l’histoire des hommes, on avait essayé de construire « une ville et une tour dont le sommet touche au ciel » (Gn 11.4), la fameuse tour de Babel (même étymologie que Babylone). « Atteindre les cieux », c’est une expression qui veut dire « chercher à s’élever aussi haut que Dieu », ou tout simplement « prendre la place de Dieu » ! C’est la caractérisation ultime de l’orgueil (cf. Ap 18.5). Et donc lorsque Daniel interprète le rêve du roi en lui disant : « Ta grandeur s’est accrue au point d’atteindre le ciel, et ta domination s’étend jusqu’aux extrémités de la terre » (4.19), ce n’est pas vraiment bon signe pour Neboukadnetsar !

Quelqu’un qui habite les cieux, dont la domination s’étend sur toute la terre, et qui fournit au monde entier son abri et sa nourriture… ça vous fait penser à qui ? Le problème de Neboukadnetsar, c’est qu’il se prend pour Dieu ! Il n’a pas égard au vrai Dieu, « qui a déterminé les temps fixés pour les hommes et les bornes de leur demeure […], en qui nous avons la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17.26, 28). Le roi s’est affranchi du vrai Dieu. Il se débrouille très bien tout seul, merci.

Au début du 20ème siècle, on a découvert en Iraq les vestiges d’une des portes de la cité de Babylone, la porte d’Ishtar, une porte immense de quinze mètres de haut, avec une inscription signée de Neboukadnetsar, qui nous donne une idée de la perception qu’il avait de son existence et de son règne : « Neboukadnetsar, le roi de Babylone ; le roi très pieux établi par la volonté de Marduk ; le grand prince et grand prêtre bien-aimé de Nabu ; celui qui est prudent et averti, qui a acquis la sagesse, qui a compris la divine essence de Marduk et de Nabu et qui rend hommage à leur majesté ; l’inlassable gouverneur qui a toujours à cœur d’entretenir le culte d’Esagila et d’Ezida [temples de Marduk et de Nabu] et qui se préoccupe constamment du bien-être de Babylone et de Borsippa ; celui qui est sage, celui qui est humble ; celui qui prend soin d’Esagila et d’Ezida ; le premier-né de Nabopolassar, le roi de Babylone ; voilà qui je suis. »

Neboukadnetsar, donc, la personnification-même de l’humilité ! Mais vous comprenez pourquoi la première partie de son rêve ne lui pose aucun problème. Lui et son royaume sont comme un arbre immense, qui atteint le ciel, qu’on voit de toute la terre, et qui produit du bon fruit pour tout le monde. Le problème, bien sûr, c’est que cette façon de voir les choses dérobe au vrai Dieu ses prérogatives et sa gloire. Le problème, c’est que Neboukadnetsar s’est élevé si haut qu’il s’est rendu le vrai Dieu inutile et inintéressant. « Je ne vois pas ce qu’il a de si extraordinaire, ce Dieu des Israélites : il ne les a pas protégés quand j’ai envahi leur pays, et moi je connais le bonheur et la tranquillité, je suis puissant, riche et célèbre, on m’admire et on me craint, j’accorde ma protection aux hommes et je leur distribue leur subsistance ; nul besoin de ce Dieu ! Finalement, quand j’y pense, je suis plus dieu que lui ! »

Et l’orgueil de Neboukadnetsar, qui remonte aux origines de l’humanité, c’est l’orgueil de tout ce qui s’élève aussi haut que le « Dieu des cieux » et qui cherche à prendre sa place. En fait, cet orgueil, c’est le carburant du monde dans lequel on vit. Nous sommes sur l’avenue Jean Jaurès ; écoutez donc ce que dit Jean Jaurès sur le sujet (grand homme politique au début du 20ème siècle) :

« Si l’idée même de Dieu prenait une forme palpable, si Dieu lui-même se dressait visible sur les multitudes, le premier devoir de l’homme serait de refuser l’obéissance et de le traiter comme l’égal avec qui l’on discute, mais non comme le maître que l’on subit. » (Discours à la jeunesse, 1903)

Jean Jaurès, Neboukadnetsar, même combat ! Et c’est sûr qu’on peut entendre ça en pinçant les lèvres et en secouant la tête avec un brin de condescendance. Tous ces gens qui se croient l’égal de Dieu… rhô, c’est pas bien ! En fait, cet orgueil… c’est aussi notre orgueil ! Neboukadnetsar, il a juste eu la « chance » d’arriver là où on aimerait tous arriver, au fond ! On a tous envie d’être notre propre patron, d’être calife à la place du calife, d’être autonome, de ne devoir rendre des comptes à personne. On est tous persuadés qu’on sait ce qu’il y a de mieux pour nous, et que si seulement on avait les rênes de notre vie, et les moyens de faire ce qu’on veut, on serait heureux. Mais qu’est-ce que Dieu en pense ? C’est la deuxième chose qu’il faut remarquer dans ce texte.

Notre orgueil : un verdict

Pour faire simple : Dieu n’est pas contre la puissance ou la prospérité, mais il veut qu’on reconnaisse que ces choses viennent de lui. Ce qui est frappant dans le texte, c’est, déjà, que Dieu inspire un rêve à Neboukadnetsar. C’est une indication que l’homme le plus puissant du monde est subordonné au vrai Dieu ; puisqu’il ne contrôle pas ses rêves, mais Dieu les contrôle ! Ensuite, ce rêve nous apprend que le vrai Dieu est capable d’émettre des décrets irrésistibles : dans le rêve, un ange descend « des cieux » (4.10, 20, c’est-à-dire de là où cherchait à s’élever le royaume de Neboukadnetsar), pour lui parler de la part de celui qui habite véritablement dans les cieux, et pour lui annoncer ce qui va « l’atteindre » (4.21). Et enfin, l’intention de Dieu en agissant de cette manière est donnée explicitement : cette sentence (ou ce décret) a pour but de faire savoir « que le Très-Haut domine sur toute royauté humaine, qu’il la donne à qui il lui plaît, et qu’il y élève le dernier des hommes » (4.14). En fait, Dieu est tout simplement en train de remettre les pendules à l’heure !

Ça me fait penser un peu à ma relation avec mes enfants. Parfois Suzanne et moi, on a l’impression que nos enfants s’imaginent qu’il suffit qu’ils aient faim pour que de la nourriture apparaisse par magie dans leur assiette. Alors qu’est-ce qu’on est tenté de faire pour remettre les pendules à l’heure ? « Puisque c’est comme ça, tu vas attendre encore une heure avant de manger ! », ou alors : « OK. On va se mettre en grève pendant une semaine, on verra après ça si vous vous prenez encore pour des petits dieux ! » De façon plus habituelle et constructive, on essaie de leur apprendre à dire « merci ». Quand ils quittent la table : « Merci maman pour le repas ». Et même avant le repas : « Merci Seigneur pour cette nourriture, pour l’argent qui a permis d’acheter ces aliments, et pour maman qui a tout préparé ».

Vous comprenez : on n’est pas contre le fait de nourrir nos enfants. On voudrait simplement qu’ils reconnaissent d’où ça vient. Et dans le texte, Dieu n’est pas contre la puissance de Neboukadnetsar ; il n’est certainement pas contre les choses qu’il fait bien dans son royaume. Mais il est contre son orgueil. Il veut que le roi reconnaisse que ce n’est pas lui, Neboukadnetsar, qui « domine », ni qui que ce soit qui serait sur terre, mais plutôt « que celui qui domine est dans les cieux » (4.23, littéralement : « les cieux dominent »).

Si seulement Neboukadnetsar reconnaissait sa propre subordination à Dieu, ça le garderait peut-être dans une forme d’humilité et de prudence et de vraie sagesse, qui serait en fait très bénéfique pour son règne et pour son pays. C’est la raison pour laquelle Daniel lui adresse avec beaucoup de courage cette exhortation de la part de Dieu, lorsqu’il a fini d’interpréter le rêve : « Ta royauté te restera quand tu reconnaîtras que celui qui domine est dans les cieux. C’est pourquoi, ô roi, puisse mon conseil te plaire ! Mets un terme à tes péchés par la justice et à tes fautes par la compassion envers les malheureux, et ta tranquillité se prolongera » (4.23-24).

On est comme Neboukadnetsar. On est comme mes enfants. On est comme tous les êtres humains, finalement ! On veut s’émanciper de Dieu, on veut s’affranchir de lui, on veut être puissant et indépendant ! On veut s’auto-déterminer. Vous vous souvenez de Pinocchio ? Il avait été créé avec beaucoup d’amour par Geppetto, le menuisier. Mais il voulait être libre, indépendant, ce qui est difficile pour une marionnette. Et dans sa quête d’indépendance, au fur et à mesure qu’il ignore la voix bienfaisante de sa conscience, il lui arrive toutes sortes de problèmes et de malheurs, jusqu’à ce qu’il se transforme en âne ! Mais finalement, c’est une fois qu’il a été complètement affaibli et humilié qu’il retrouve Geppetto au fin fond de sa misère, dans le ventre-même du poisson qui l’a avalé, et que sa vie change de direction. Fini, le désir de s’auto-déterminer. Maintenant, il est humble et docile. Et c’est ça, finalement, qui lui permettra de connaître la vraie liberté, en devenant enfin un vrai petit garçon. Mais c’est dur pour nous d’accepter de prendre ce chemin. Et c’était dur pour Neboukadnetsar.

Notre orgueil : un remède

Regardez ce qui lui est arrivé. C’est la troisième chose qu’il faut remarquer dans ce texte : l’éducation que reçoit Neboukadnetsar de la main même de Dieu. Il a reçu un rêve, et il en a reçu l’explication, et il en a même reçu une exhortation solennelle. Mais cela n’a pas guéri son orgueil. Un an plus tard, Neboukadnetsar continue de faire du Neboukadnetsar, et il se vante de la beauté de Babylone (4.27). Il y a sans doute de quoi ! Flavius Josèphe, un historien juif du premier siècle attribue à Neboukadnetsar la construction des fameux jardins suspendus de Babylone, l’une des sept merveilles du monde !

Mais soudain les cieux qui ont été défiés font entendre leur reproche, et le rêve s’accomplit (4.28) : Neboukadnetsar est dépouillé de sa royauté, de sa puissance, de ses richesses et même de sa dignité. Il se retrouve dans la condition d’un animal sauvage ! Sa subordination à Dieu est exposée au regard de tous : comme tous les animaux sauvages, il est redevable à Dieu de sa nourriture, et comble de l’ironie, il est exposé à la rosée… « des cieux ». Jusqu’au jour (marqué par Dieu), ou enfin le grand roi Neboukadnetsar lève les yeux… vers les cieux (4.31), comme pour s’avouer vaincu. Oui, il y a un Dieu tout-puissant « qui agit comme il lui plaît avec l’armée des cieux et avec les habitants de la terre, et il n’y a personne qui résiste à sa main » (4.32) !

Alors on ne sait pas exactement ce qui est arrivé à Neboukadnetsar d’un point de vue clinique. Il existe en psychiatrie un trouble mental appelé la « zoanthropie », où les malades se croient possédés par un animal, ou changés en animal. On dirait bien que c’est ce qui est arrivé à Neboukadnetsar. Il a dû soudainement se prendre pour un animal, et se comporter comme un animal. Vous imaginez ? Se mettre à grogner et à braire, se rouler par terre, galoper, manger de l’herbe, renifler les gens, faire caca n’importe où… Ce n’est pas étonnant qu’on l’ait mis dehors ! On est censé être tout-à-fait impressionné par ce qui est arrivé à Neboukadnetsar. Malgré toute sa puissance, il était fragile.

Je me souviendrai toujours de quelque chose qui m’a beaucoup impressionné quand j’étais ado. J’avais un ami qui a été atteint d’une bouffée délirante. C’est quelque chose qui arrive plus fréquemment qu’on ne le croit : soudainement, une personne se met à tenir des propos incohérents bien qu’elle soit tout-à-fait consciente et réveillée. Elle hallucine, elle n’est plus elle-même, et impossible de la ramener à la raison. Mon ami a dû être hospitalisé en urgence, en psychiatrie où il est resté plusieurs semaines. Mais rien ne pouvait laisser présager cette crise délirante.

J’en ai retenu que l’être humain est fragile, malgré tout ce qu’on peut penser. Et c’est aussi ce que l’histoire de Neboukadnetsar doit nous apprendre. Cette histoire nous prouve que Dieu peut humilier le plus élevé des hommes. Mais elle prouve aussi que Dieu peut élever le plus humilié des hommes. Et les Israélites qui reçoivent cette histoire doivent se dire : « Notre Dieu est grand ! Il est capable d’humilier les puissances qui nous tyrannisent ! Et il est capable de donner le règne au dernier des hommes ! Il fait ce qu’il veut ; et personne n’est hors d’atteinte de notre Dieu ! » Voilà qui est encourageant pour les Israélites.

Mais voilà aussi qui les renvoie à leur propre orgueil. Parce que s’ils vivent en captivité à Babylone, c’est justement parce que Dieu les a humiliés, eux aussi, parce qu’ils ont voulu s’affranchir de Dieu. Mais Dieu peut aussi les relever au temps marqué par lui. Qu’ils renoncent donc à cet orgueil qui les a conduits là où ils se trouvent, et qu’ils lèvent les yeux vers les cieux et qu’ils glorifient celui qui s’y trouve, à savoir « le roi des cieux », comme l’appelle Neboukadnetsar à la fin de ce passage (4.34).

Et à nous aussi, ce texte nous rappelle que tous les Neboukadnetsar de ce monde sont subordonnés à Dieu. Kim Jong-un est subordonné à Dieu ; Bashar al-Assad, Hassan Rouhani, Angela Merkel, Justin Trudeau sont tous subordonnés à Dieu ; et bien sûr Emmanuel Macron. Monsieur le président, si vous écoutez cette prédication, permettez-moi de vous dire que ce n’est pas sur un malentendu que vous avez été élu, ni parce que vous seriez quelqu’un d’exceptionnellement brillant, mais c’est parce que « le Très-Haut domine sur toute royauté humaine et qu’il la donne à qui il lui plaît, et qu’il y élève le dernier des hommes » (4.14). Je vous invite à reconnaître que celui qui « domine » n’habite pas le palais de l’Élysée, mais qu’il est dans les cieux (4.23). Levez les yeux vers lui et reconnaissez que c’est en lui que vous avez « la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17.28). Cherchez-le là où il s’est révélé, c’est-à-dire dans la Bible, et vous le trouverez, et votre vie en sera éternellement changée.

Et nous tous qui sommes des petits Neboukadnetsar, appliquons la moralité de cette histoire à notre orgueil. Ouvrons les yeux : notre puissance, nos richesses, notre célébrité (que nous avons ou que nous souhaitons) ne nous feront rien gagner à la fin. Il n’y a personne de si puissant que Dieu ne puisse l’abaisser… mais il n’y a personne non plus de si faible que Dieu ne puisse le relever. Comme nous le chantons parfois :

« Faible ou puissant, l’homme n’est rien ; il pèse moins avec ses biens, qu’un souffle au creux d’une balance. » (Ps 62.10)

Et la meilleure façon de prendre conscience de cette réalité, c’est de contempler non seulement l’histoire de Neboukadnetsar, mais de contempler aussi et surtout… l’histoire de Jésus, le messie qu’attendaient les Israélites de l’époque de Neboukadnetsar.

Comment prendre en détestation notre orgueil, sinon en regardant la croix où ce messie est mort ? Voilà où mon orgueil a conduit Jésus. Voilà le visage de ma gloire aux yeux de Dieu : c’est le visage ensanglanté du messie, son Fils. Voilà ce que valent mes aptitudes personnelles : elles valent ce châtiment effroyable, le châtiment de l’enfer. Mais si indigne et vil et méprisable que je puisse être par nature, à cause de ma condition de pécheur, je ne suis quand même pas hors d’atteinte de Dieu.

Quand Dieu m’ouvre les yeux sur mon orgueil et mon péché, je suis terrassé ; et parfois dans sa providence, Dieu emploie des moyens matériels pour m’humilier : la maladie, la banqueroute, un accident, une rupture relationnelle, un deuil… Mais c’est au fin fond de ma misère que Jésus me rencontre, dans le ventre du poisson, dans le tombeau où m’a entraîné mon désir d’auto-détermination. Et c’est là que Jésus prend ma place ; il se laisse dépouiller de sa royauté, de sa puissance, de ses richesses et même de sa dignité… pour que moi, le dernier des hommes, je sois élevé et que j’accède à son royaume éternel.

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