Le péché, dehors !

Par Alexandre Sarranle 26 mai 2019

On a tous déjà entendu parler des scandales d’abus sexuel qui ont pu se produire au sein de l’Église catholique romaine. L’affaire Preynat, par exemple, du nom de ce prêtre accusé d’avoir abusé d’au moins 70 enfants à Lyon dans les années 1970-1980. Ou encore au Chili, où la justice enquête sur 148 affaires d’abus sexuels commis par des membres de l’église sur des mineurs et sur des adultes.

Ou peut-être que vous avez entendu parler du journaliste et sociologue Frédéric Martel qui vient de sortir un livre de 600 pages intitulé : Sodoma, enquête au cœur du Vatican. L’auteur, qui a interrogé 1500 ecclésiastiques, révèle l’immoralité sexuelle qui existe tout en haut de la hiérarchie de l’Église romaine. À l’AFP, il déclare : « Il y a des cardinaux qui vivent avec leurs amants, souvent un assistant ou un ami. Ensuite il y a des cardinaux qui sortent et qui ont des amants. D’autres, au moins deux cardinaux proches de Jean-Paul II, ont eu recours à des prostitués masculins. »

Et pas plus tard que cette semaine, le nonce apostolique en France (ambassadeur du Vatican) a été confronté à quatre hommes qui ont porté plainte contre lui pour des faits récents d’agression sexuelle, et qui demandent la levée de son immunité diplomatique pour qu’il puisse comparaître devant la justice française. Vous voyez ? « On entend parler constamment » de ce genre d’affaires dans l’église, pourrait-on dire !

Mais de peur que vous vous disiez dans votre for intérieur : « Je te rends grâces Seigneur de ce que je ne suis pas comme ces catholiques romains ; moi je suis protestant évangélique ! » (cf. Lc 18.11-12), je voudrais aussi vous signaler, en passant, que la plus grande dénomination évangélique américaine a été visée par une enquête au début de l’année, qui a révélé que 380 membres des personnels de ces églises faisaient l’objet d’accusations crédibles de crimes à caractère sexuel à l’encontre d’au moins 700 victimes.

Et puis depuis quelques années, on entend aussi parler de cette histoire où des centaines de responsables « jeunesse », provenant d’églises évangéliques, se sont réunis pour une convention organisée dans un grand hôtel. À l’issue de la conférence, la direction de l’hôtel a affirmé que le nombre de connexions aux chaînes « adulte », pendant ces quelques jours, avait dépassé tous les records précédents.

Bref. J’imagine que personne n’est trop surpris, au fond, par ce genre de chose. Ce n’est pas parce qu’on prend l’appellation de « chrétien » qu’on arrête soudainement d’être des humains ou qu’on devient tout d’un coup moralement irréprochable.

On est d’accord avec ça, mais le problème, c’est que lorsque des comportements de ce genre deviennent visibles ou notoires chez des chrétiens, surtout dans notre propre église, on ne sait pas trop comment réagir. Ça nous met mal à l’aise d’en parler, et ce qui nous semble beaucoup plus confortable, c’est de fermer les yeux. De se dire que c’est juste passager, que ça va s’améliorer, que ce n’est peut-être pas si grave, et même de se dire : « On vit sous la grâce, et l’amour couvre une multitude de péchés ! On ne va quand même pas soulever ce point, au risque de gâcher la fête, au risque d’humilier cette personne, au risque de perdre une amitié, au risque de diviser l’église, au risque d’occulter le témoignage à l’évangile… »

Le problème, c’est qu’en évitant le sujet, en fin de compte, non seulement on fait une nouvelle violence aux victimes (quand il y en a), mais on va aussi s’attirer des conséquences beaucoup plus graves, et c’est ce que l’apôtre Paul veut nous dire à travers le texte qu’on va lire dans un instant. Pour citer l’archevêque de Strasbourg, M. Luc Ravel : « Par peur de gérer le vent du scandale, nous récoltons la tempête. » Ou pour le dire autrement : à l’église, on doit mettre le mal à la porte, parce qu’il n’est pas du tout le bienvenu chez nous !

Détester le mal (v. 1-2)

Premier point : on devrait être profondément peiné par la présence du mal en nous et au milieu de nous.

Regardez le texte. Pour commencer, l’apôtre Paul dénonce la présence de ce qu’il appelle « l’inconduite » chez les chrétiens de l’église de Corinthe. Dans d’autres traductions, vous avez « impudicité », « immoralité », « immoralité sexuelle », « fornication », ou « débauche ». En grec, c’est le mot porneia, qui est un mot générique dans la Bible pour désigner toute activité sexuelle illicite, c’est-à-dire, pour être très clair, toute activité sexuelle qui sort du cadre exclusif d’un mariage monogame hétérosexuel légitimement contracté.

Et donc à l’église de Corinthe, on tolérait l’immoralité sexuelle, et c’était au point où certaines situations dépassaient même en « degré d’immoralité » ce que les non-chrétiens pouvaient faire ! Il y a un gars parmi eux qui couche avec la femme de son père (sa belle-mère), et tout le monde le sait ! Et Paul est très en colère, parce que les chrétiens de cette église sont très fiers, ils bombent le torse, ils se vantent peut-être de la taille de leur église et de l’éloquence de leur pasteur, plutôt que d’être horrifiés par cette situation.

Paul intervient en tant qu’apôtre ici, un peu comme on pourrait imaginer un grand chef cuisinier (Pierre Orsi ou Paul Bocuse, par exemple) qui enguirlande son équipe (qu’on appelle la « brigade ») en leur disant : « Non mais qu’est-ce que ça veut dire ? Regardez-moi ça ! Vous êtes allés le chercher où ce poisson dégoûtant ? Et qui c’est qui a mis autant de poivre dans la sauce ? Et comment est-ce que vous m’avez cuisiné ce filet mignon qui a la texture d’une semelle de chaussure ? C’est immangeable ! Il n’y a pas marqué MacDonald sur la devanture de mon restaurant ! D’ailleurs même au MacDo ils n’oseraient jamais servir une telle horreur. »

Et dans notre texte, c’est pareil. L’apôtre Paul dit : « Il n’y a pas marqué temple païen sur la devanture de l’église. D’ailleurs même les païens seraient choqués par une telle relation incestueuse ! Mais vous, bof ! » Paul est en train de pointer cette profonde contradiction entre la profession de foi de ces gens et le comportement de ces gens.

Ça me fait penser à quelqu’un qui a commenté cette fameuse histoire des responsables « jeunesse » qui s’étaient réunis en convention dans ce grand hôtel ; et cette personne a dit : « Oui, c’est à croire que Jésus a dit : À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous visionnez plus de pornographie que les païens » (cf. Jn 13.35). Quelle profonde contradiction, nous dit l’apôtre Paul !

C’est vrai que le texte se concentre ici sur un exemple, celui de l’inconduite sexuelle, qui concerne tout particulièrement les Corinthiens. Mais il y a un principe général. Si on prend l’appellation de « chrétiens », on devrait se soucier de ce qui plaît ou non à Jésus-Christ, et la façon de savoir ça, c’est en prenant à cœur ses instructions dans la Bible. Et la Bible nous indique, sur beaucoup de sujets, ce qui est bien et ce qui est mal. Et ici, le texte nous dit que si on est chrétien, on devrait être profondément peiné par la présence du mal en nous et au milieu de nous.

Est-ce que la présence du mal, selon la définition qu’en donne la Bible, nous chagrine ? Est-ce que sa présence nous dérange profondément ? Est-ce qu’on est disposé à apprendre, d’après la Bible, ce qui plaît ou non à Dieu ? Et quand on découvre ce qui déplaît à Dieu, est-ce qu’à notre tour, on déteste ces choses, ou bien est-ce qu’on s’en accommode ?

Traiter le mal (v. 3-5)

Deuxième point : la bonne façon de répondre au mal, c’est parfois de lui administrer un traitement de choc.

L’apôtre Paul continue en nous disant à quoi on devrait pouvoir reconnaître si vraiment on est peiné par la présence du mal en nous ou au milieu de nous. Il dit aux Corinthiens qu’ils auraient dû « ôter du milieu d’eux » cette personne en particulier qui commettait l’inceste au vu et au su de tous. Paul émet un jugement solennel par rapport à cette situation, sans pouvoir être présent lui-même ; c’est pourquoi il dit qu’il le fait « en esprit » (v. 3-4). Et la sentence, c’est la suivante : il faut « livrer cette personne à Satan », c’est-à-dire l’expulser de la communion de l’église. Pourquoi ? Pour la destruction de la chair en vue du salut de son esprit (v. 5).

Paul veut dire tout simplement que l’église, par la voix de ses anciens (ses responsables), doit prononcer officiellement l’exclusion de cette personne puisqu’elle s’obstine dans son inconduite. Elle est jetée dehors spirituellement (d’où l’allusion à Satan, le prince des ténèbres). Mais cette démarche a un but : c’est d’amener cette personne à la repentance. La « destruction de la chair » est une expression qui désigne une violence faite à l’encontre de la chair au sens moral, c’est-à-dire les mauvais désirs qui existent en nous naturellement.

« Livrer cette personne à Satan », ce n’est pas juste une démarche punitive. C’est une démarche pédagogique ou thérapeutique. C’est une correction : le but est de corriger.

Imaginez que vous receviez les résultats de vos analyses de sang, et vous découvrez que votre glycémie (taux de sucre) est extrêmement élevée. Alors vous avez besoin de corriger ça. Comment ? En vous faisant violence et en supprimant tous les sucres de votre alimentation pendant une certaine durée, avant de reprendre en fin de compte, si tout va mieux, une alimentation normale et équilibrée. La suppression des sucres n’est pas une fin en soi, mais un « traitement de choc » destiné à vous rétablir dans votre santé.

De la même façon, cette démarche que présente l’apôtre Paul n’est pas une fin en soi. Il présente cette démarche d’abord comme un traitement. En théologie, on parle de « correction ecclésiastique » ou de « discipline ecclésiastique ».

Voici comment ça devrait se passer, si on se fie aux instructions de Paul, qui lui-même s’appuie sur les instructions de Jésus qu’on trouve notamment dans l’Évangile selon Matthieu (Mt 18.15-20). Imaginez. Quelqu’un dans notre église (Jean-Jacques), qui fait profession de foi chrétienne, qui a été baptisé et qui prend la sainte-cène chaque dimanche, commence à échanger des SMS de plus en plus intimes et romantiques avec une personne qui n’est pas sa femme. Un ami de l’église (Jean-Pierre) le découvre. La responsabilité de Jean-Pierre est de parler à Jean-Jacques en privé, en priant et en espérant que Jean-Jacques l’écoute, qu’il se rende compte qu’il fait le mal, qu’il confesse sa faute à Dieu, à sa femme, à Jean-Pierre et à la personne à qui il envoyait des SMS, et qu’il prenne toutes les dispositions nécessaires pour que ça ne se reproduise jamais.

Mais si Jean-Jacques n’écoute pas, Jean-Pierre doit prendre avec lui Jean-Luc, qui est informé de cette affaire, et retourner voir Jean-Jacques, avec les mêmes intentions. Si Jean-Jacques ne les écoute toujours pas, alors Jean-Pierre et Jean-Luc doivent en parler aux anciens de l’église : Jean-Marie, Jean-Daniel et Jean-Baptiste, qui à leur tour vont discuter de cette situation avec Jean-Jacques, le but étant toujours que Jean-Jacques prenne conscience de ses actes et corrige son comportement par une démarche de repentance.

Cet accompagnement pastoral (cette admonestation) peut s’étendre sur quelque temps, et pendant ce temps, il est possible que les anciens interdisent à Jean-Jacques de prendre la sainte-cène, tant que cet aspect de sa vie n’entre pas en conformité avec sa profession de foi. Mais si malgré tout, Jean-Jacques n’écoute toujours pas, alors les anciens doivent lui dire officiellement : « Nous ne te considérons plus comme un chrétien, tu n’as pas ta place dans la communion de l’église, et nous prions que ton exclusion serve à t’ouvrir les yeux sur le mal que tu commets. » Et cette information doit être communiquée au reste de l’assemblée.

Ça peut sembler un peu rude, pour nous, individualistes du 21ème siècle, héritiers des Lumières, de la Révolution Française et de Mai 1968. Mais c’est ainsi que la Bible nous ordonne de prendre soin de nous-mêmes et de l’église. Le mal, c’est dégoûtant en nous, et c’est dégoûtant dans l’église, et la bonne façon de répondre au mal, c’est parfois de lui administrer un traitement de choc. Un traitement de choc destiné à nous rétablir, en fait. Jésus lui-même a dit, rappelez-vous :

« Si ta main ou ton pied est pour toi une occasion de chute, coupe-les et jette-les loin de toi ; mieux vaut pour toi entrer dans la vie manchot ou boiteux, que d’avoir deux pieds ou deux mains et d’être jeté dans le feu éternel. » (Mt 18.8)

Surveiller le mal (v. 6)

Troisième point. On doit faire très attention à la présence du mal près de nous, parce que le mal, c’est contagieux.

Au verset 6, l’apôtre Paul donne une deuxième raison pour laquelle il est important que les Corinthiens excluent de leur église cet homme qui commettait l’inceste ; et en fait, non seulement lui, mais tous ceux qui pratiquaient l’immoralité sexuelle. Au v. 5, il a dit : « Qu’un tel homme soit livré… », c’est-à-dire : « Que cette sorte de personne… ».

Donc pourquoi faut-il exclure ces gens ? Non seulement pour leur bien (pour qu’elles soient incitées à la repentance et au rétablissement dans leur relation à Dieu et aux autres) mais aussi pour préserver le reste de la communauté d’une sorte de « propagation » du mal. L’apôtre Paul dit que si on tolère l’immoralité chez un ou deux membres de l’église… ça risque de se répandre parmi les autres. C’est dangereux. C’est une pente savonneuse, comme on dit.

En fait, c’est un peu comme… quand on met du levain dans de la pâte à pain ! Il suffit d’un peu de levain pour que toute la pâte, si on la laisse reposer, commence à gonfler. Comment ça marche ? Eh bien le levain, d’après une définition que j’ai trouvée sur internet, c’est « un ensemble microbien formé de nombreuses cellules appartenant au moins à une espèce ou à un genre, qui, ajouté à une matière première alimentaire, doit permettre l’obtention d’un produit fermenté en orientant et en accélérant son processus de fermentation. » En gros, le levain c’est une colonie de microbes. On peut entretenir un levain en le nourrissant, c’est-à-dire en lui donnant de l’eau et de la farine, et il va vivre, grandir, se reproduire. Et on en met un peu dans la pâte, et toute la pâte va commencer à fermenter, c’est-à-dire que des bulles vont se former à l’intérieur, et après quelques heures, vous aurez une pâte bien dodue prête à être enfournée.

Et l’apôtre Paul nous dit que le mal—ce que la Bible appelle le péché, tout ce qui est contraire à la volonté de Dieu—ça agit comme ça au sein d’une communauté humaine. C’est comme une infection. Ça peut commencer tout petit. Mais petit à petit, le système immunitaire s’affaiblit, et l’infection gagne du terrain. On va juste fermer les yeux sur ce petit péché mignon. On va juste éviter d’aborder ce sujet dans la prédication, qui risque de heurter telle ou telle personne. On va juste rappeler combien grande est la grâce de Dieu, et sûrement que cette personne va se rendre compte toute seule qu’elle vit en contradiction avec sa profession de foi. On va invoquer la liberté de conscience pour excuser telle ou telle habitude dans la vie de tel ou tel chrétien, pour ne pas sembler trop moraliste.

Cette semaine, j’ai lu, sur un site non-chrétien, l’interview d’un sociologue qui a étudié la façon dont la perception de l’immoralité sexuelle a évolué au sein de la population évangélique sur les dernières décennies. Il dit ceci : « Les gens s’habituent aux images pornographiques. Prenez la série Game of Thrones, par exemple. Je pense qu’il y a vingt ans, elle aurait probablement été rangée dans la catégorie pornographie. […] Et ce qui m’a frappé, c’est comment les chrétiens que j’ai interviewés commencent à réagir après avoir regardé de manière habituelle des images pornographiques. Les statistiques le montrent. Ils commencent à prendre un peu de recul par rapport à leur foi. Ils se mettent à prier un peu moins, ils vont un peu moins à l’église, ils sont moins enclins à penser que Dieu a un rôle important dans leur vie. »

Vous voyez, le levain qui commence à agir ? Qu’est-ce qu’on tolère dans notre propre vie, sans même que les gens autour de nous le sachent, qui présente ce danger pour notre foi ? Et qui présente ce danger, en fin de compte, même pour notre église ? On doit faire très attention à la présence du mal près de nous, parce que le mal, c’est contagieux.

Éradiquer le mal (v. 7-13)

Et enfin, quatrième et dernier point. Si le mal n’a pas du tout sa place chez nous, c’est surtout parce que Jésus est mort pour nous en débarrasser.

Regardez ce que dit l’apôtre Paul à partir du verset 7. Il garde cette métaphore du levain et de la pâte, et il dit que la communauté des chrétiens, normalement, devrait être comme une pâte sans levain. Pourquoi ? Parce que Christ a été immolé, c’est-à-dire offert en sacrifice. Quel est le rapport ?

Eh bien dans l’Ancien Testament, les Israélites devaient manger des pains sans levain à l’occasion de la fête annuelle de la Pâque, qui commémorait la sortie d’Égypte. Moïse avait dit aux esclaves hébreux de sacrifier des agneaux et de mettre du sang de ces agneaux sur les portes de leurs maisons pour qu’ils soient épargnés de la dixième plaie, à savoir la mort des premiers-nés dans tout le pays d’Égypte. Et Paul dit aux chrétiens : vous êtes une pâte sans levain pour commémorer votre libération au prix du sang de l’agneau de Dieu, le véritable sacrifice, Jésus-Christ !

La vie d’un chrétien, et la vie de l’église, c’est la fête perpétuelle de cette délivrance. Jésus s’est offert en sacrifice pour payer le prix de nos péchés, le prix du mal qui nous infectait et qui nous empêchait de nous approcher de Dieu. Il est ressuscité le dimanche en vainqueur. Et tous ceux qui s’attachent à lui par la foi entrent au bénéfice de cette œuvre incroyable qui nous assure le pardon de nos fautes, l’inclusion dans la famille de Dieu, et la certitude de vivre éternellement au paradis.

Voilà ce qu’on est si on est en Christ. On est juste aux yeux de Dieu. On a été sanctifié (mis à part pour Dieu) et on est appelé à être saint (appelé à vivre selon notre nouveau statut aux yeux de Dieu), c’est comme ça que Paul avait décrit les Corinthiens au début (1 Co 1.2). Jésus est mort pour qu’on soit pardonné, purifié, et qu’on devienne le peuple saint de Dieu, conformément à son appel millénaire : « Vous serez saints, car je suis saint » (1 Pi 1.16).

Imaginez un joueur de foot qui aurait joué pendant 10 ans pour l’équipe de Saint-Étienne. Un jour, il est transféré à l’Olympique Lyonnais. Normalement, au moment où il commence à jouer pour l’OL, il devrait arrêter de marquer des buts pour Saint-Étienne et commencer à marquer des buts pour l’OL ! Logique ! Même si c’est dur au début ; peut-être que pendant quelques matches, il va marquer contre son camp par mauvais réflexe, mais ce n’est absolument pas normal. Il doit marcher en nouveauté de vie dorénavant.

Et c’est pareil quand on est chrétien. C’est pareil quand on a été transféré du pouvoir des ténèbres au royaume de Jésus-Christ (Col 1.13) ; quand on a été appelé des ténèbres à l’admirable lumière de Dieu (1 Pi 2.9). Ce n’est absolument pas normal pour nous de commettre le mal. Ce n’est absolument pas normal pour nous de laisser s’installer le mal au milieu de nous et de le laisser infecter notre vie et se répandre autour de nous, si nous sommes des chrétiens.

Et c’est une autre raison pour laquelle Paul dit qu’il est important d’exercer la correction ou la discipline ecclésiastique. Non seulement pour inciter les gens fautifs à la repentance ; non seulement pour empêcher le mal de se répandre, mais aussi pour préserver la pureté de l’église qui est le peuple de Dieu. Tout simplement pour que l’église reflète autant que possible ce qu’elle est censée être : le peuple saint de Dieu, ou pour le dire autrement, l’épouse de Christ, « glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et sans défaut » (Ép 5.27). Le v. 13, en fait, est un refrain ancien que l’on trouve déjà dans la loi de Moïse.

Vous avez vu que dans les versets 9-13, Paul a élargi ses propos, et il ne se concentre pas seulement sur l’immoralité sexuelle. Il fait une liste de toutes sortes d’autres péchés (v. 10-11), une liste non exhaustive, en disant que les gens qui se disent chrétiens et qui vivent manifestement de cette manière devraient faire l’objet de cette discipline ecclésiastique, et en fin de compte, s’ils ne se repentent pas, devraient être exclus de la communauté (v. 13).

Paul précise bien qu’il n’est pas en train de parler d’avoir un comportement sectaire ou autarcique par rapport à tous les gens qui vivent comme ça. Ça irait contre les instructions de Jésus, en fait, et même contre son exemple, lui qui nous a dit d’aller dans le monde entier pour faire des disciples.

Par contre, quand Paul dit qu’il ne faut pas même « manger » avec une personne qui se dit chrétienne et qui vit en contradiction manifeste avec sa profession de foi, il fait référence à la communion formelle ou visible de l’église, qui s’exprime par excellence au moment de la sainte-cène. Ce n’est pas une interdiction littérale et absolue de prendre de la nourriture en compagnie d’un hypocrite ou de quelqu’un qui a été exclu de l’église ; c’est plutôt l’interdiction de lui donner l’impression que l’église l’accueille au nom du Seigneur, alors que l’église l’a en réalité exclue au nom du Seigneur.

En pratique, il y aura des occasions où il sera approprié de s’asseoir à table avec Jean-Jacques, et en d’autres occasions, ce sera inapproprié. La question qu’il faut se poser, c’est : est-ce que cette situation va communiquer à cette personne une réalité contraire à celle qui a été prononcée par l’église ?

Je m’arrête ici après avoir été assez long et technique ! En introduction, on a évoqué le mal qui continue d’exister en nous et parmi nous, et la tentation qu’on a de fermer les yeux, de s’en accommoder, voire même de l’approuver. Mais en conclusion, retenons ceci : c’est qu’à l’église, on doit mettre le mal à la porte, parce qu’il n’est pas du tout le bienvenu chez nous ! Il n’est pas du tout le bienvenu, parce que Christ, notre Pâque, a été immolé, pour mettre le mal sous ses pieds, et pour qu’on puisse vivre en nouveauté de vie avec la détermination et la puissance de lutter efficacement contre le péché, pour la gloire de Dieu et pour notre bien !

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