Au nom de la loi !

Par Alexandre Sarranle 17 octobre 2021

Et si on commençait, cet après-midi, par un petit quizz sur… la loi de Dieu ? Ça vous dit ? Un petit test de vos connaissances de ce que Dieu attend de vous, selon ce qu’il a révélé dans les Saintes Écritures. Vous pensez que vous auriez une bonne note ? Qui veut commencer ?

Par exemple. Est-ce que vous pourriez facilement me dire quel est le huitième des Dix Commandements ? Est-ce que vous pouvez me dire combien de témoins il faut, d’après la loi de Dieu, pour pouvoir établir qu’une personne a commis une faute ? Et qu’est-ce qui est prévu dans la loi de Dieu, si on découvre qu’un témoin à charge est un faux témoin ? (Dt 19.15-20) Ou encore, est-ce que vous savez quelle est la différence sur le plan moral, toujours d’après la loi de Dieu, entre une femme qui se fait agresser sexuellement dans la ville et une femme qui se fait agresser sexuellement dans la campagne ? (Dt 22.23-27)

Pas facile. Il y en a sûrement ici qui connaissent les réponses à ces questions, il y en a d’autres qui ont peut-être une petite idée, et d’autres encore qui ne savaient même pas que la Bible abordait tous ces sujets (et bien plus encore).

Là où je veux en venir, c’est : quel est votre rapport à la loi de Dieu, c’est-à-dire à l’ensemble des exigences de Dieu, que Dieu nous a révélées dans la Bible ? Est-ce que ça vous impressionne, est-ce que ça vous intimide, est-ce que ça vous repousse, est-ce que ça vous accable, est-ce que ça vous fascine, est-ce que ça vous rassure ? Ou bien est-ce que vous vous en fichez un peu, parce que vous ne vous sentez pas tellement concerné ?

Le texte qu’on va voir aujourd’hui va souligner l’importance du rôle de la loi de Dieu (encore une fois, la loi de Dieu, ici, ça désigne tout simplement l’ensemble des exigences morales de Dieu, qu’on trouve consignées dans la Bible)—l’importance donc du rôle de la loi de Dieu pour bien comprendre l’Évangile. La loi de Dieu, c’est un concept incontournable si on veut bien comprendre pourquoi on a besoin d’être sauvé, et comment on peut être sauvé.

Est-ce que ça vous intéresse, de bien comprendre ces choses ? Alors c’est important que vous vous intéressiez à la loi de Dieu.

On est donc en train d’étudier une lettre que l’apôtre Paul a écrite à la communauté chrétienne de la ville de Rome au premier siècle, et là où il en est dans cette lettre, pour l’instant, c’est qu’il est en train de démontrer que tous les êtres humains sans exception sont dans une situation extrêmement préoccupante. On a vu ça ces dernières semaines : tout le monde est coupable, maudit et complice, et on va être jugé selon la vérité, et Dieu va rendre à chacun selon ses œuvres. On devrait s’en inquiéter !

Et pour qu’on comprenne encore mieux cette situation préoccupante dans laquelle on se trouve, l’apôtre Paul va maintenant introduire un concept auquel il n’avait pas encore fait référence jusqu’ici dans sa lettre. C’est le concept de « la loi ». C’est un mot qu’il n’a pas employé jusqu’ici, mais tout d’un coup, qu’il va employer 21 fois dans le passage qu’on est sur le point de lire. C’est dire qu’il veut attirer notre attention là-dessus !

Et c’est logique, parce que Paul vient juste de dire qu’on va être jugé par Dieu. Mais là où il y a un jugement, il y a forcément une loi. Quand on comparaît dans un tribunal, c’est pour être jugé selon la loi. Le juge est chargé d’administrer la loi. La loi est l’instrument qui permet d’établir notre innocence ou notre culpabilité. C’est la loi qui détermine si ce qu’on a fait, c’est bien, ou pas bien.

Et donc, si Dieu va rendre « à chacun selon ses œuvres » (Rm 2.6), c’est la loi de Dieu qui va être le critère pour évaluer nos œuvres, vous comprenez ? C’est la loi de Dieu qui fixe la norme de la justice dans tout l’univers, pour tous les humains.

Donc effectivement, si on veut bien comprendre pourquoi on a besoin d’être sauvé, et comment on peut être sauvé, il faut qu’on s’intéresse à la loi de Dieu, et surtout, il faut qu’on en tire les bons enseignements. C’est à ça qu’on va réfléchir aujourd’hui.

Et ce qu’on va voir, c’est que l’apôtre Paul nous met en garde contre trois mauvaises manières de considérer la loi de Dieu : d’abord—et c’est peut-être évident—en pensant qu’on peut l’ignorer complètement, ensuite en la connaissant seulement, et enfin en la mettant en pratique extérieurement mais pas intérieurement. C’est ce que j’ai appelé le péril de l’ignorance, le péril de la connaissance, et le péril de l’apparence.

1/ Le péril de l’ignorance (v. 12-16)

C’est super important qu’on s’intéresse à la loi de Dieu, et qu’on en tire les bons enseignements. Premièrement : « le péril de l’ignorance ». C’est le premier point que Paul veut nous faire comprendre : c’est qu’on ne peut pas se contenter d’ignorer la loi de Dieu.

Regardez le texte (v. 12-16). Ce n’est pas forcément très évident ce qui se passe, mais en gros, Paul commence par établir un principe de base, et ensuite il fait une application à un groupe de gens en particulier.

Le principe de base, c’est que la loi de Dieu s’applique à tout le monde. Au verset 12, il dit qu’il y a deux types de personnes sur la terre : ceux qui ont péché sans la loi, et ceux qui ont péché sous la loi. Bref, tout le monde a péché ! La question, c’est : est-ce qu’on l’a fait en ayant la loi, ou en ne l’ayant pas. Mais tous ont péché, ce qui sous-entend que même ceux qui n’ont pas la loi sont jugés « pécheurs » par la loi, puisque le péché selon Dieu est déterminé par la loi de Dieu.

Donc qu’on ait ou non la loi, Paul dit qu’on est coupable selon la loi. Imaginez qu’on vous propulse sur un terrain de tennis avec une raquette, en plein milieu du tournoi de Roland Garros, et qu’on vous dise : « Vas-y joue ! C’est Novak Djokovic en face ! » Mais que vous ne connaissiez pas du tout les règles du tennis. Vous « n’avez pas » les règles, mais ça ne va pas empêcher les règles de s’appliquer. Tant pis pour vous. Vous allez mal jouer sans les règles et vous allez « périr » sans les règles, vous comprenez ?

Dans le texte, c’est pareil. « Nul n’est censé ignorer la loi, » comme on dit. Vous n’avez pas la loi ? Vous êtes quand même pécheur, et vous allez quand même périr.

Et ceux qui ont la loi ? Eh bien eux aussi sont pécheurs, mais eux au moins, ont une norme, une règle, qui leur permet de savoir ce que c’est qu’ils font de mal et qui les empêche d’être justes. La loi en effet est la norme de la justice—c’est ce que Paul rappelle en disant très clairement :

« Ceux qui pratiquent la loi seront justifiés. » (v. 13)

Donc ça, c’est le principe de base qui va fonder tout ce que Paul va dire ensuite sur la loi. « Ceux qui pratiquent la loi seront justifiés, » et comme tout le monde va comparaître devant Dieu pour être jugé (pour voir s’ils sont justes), eh bien la loi de Dieu s’applique à tout le monde.

Mais après avoir établi ce principe de base, Paul fait une application à un groupe de gens en particulier, qui sont les « païens » (v. 14). C’est-à-dire les gens qui n’appartiennent pas au peuple des Israélites (appelés « juifs » dans ce passage). Les païens, justement, ce sont ceux qui « n’ont pas la loi », parce que la loi, c’était un truc spécifiquement israélite. La loi, ça désigne les exigences de Dieu pour les humains, mais ces exigences n’avaient été révélées clairement qu’au peuple d’Israël, surtout à travers le prophète Moïse.

Mais l’apôtre Paul dit que même les païens qui n’ont pas la loi sous la forme que l’ont les Israélites, ont quand même la loi sous une certaine forme. Paul dit que « l’œuvre de la loi est écrite dans leur cœur » (v. 15). C’est-à-dire qu’il y a une trace de la loi de Dieu dans leur être intérieur. Ils ont l’intuition de la loi de Dieu. Logique, Dieu les a créés à son image !

Et c’est vrai, n’est-ce pas, que pratiquement tout le monde sur terre a au moins un certain sens du bien et du mal. On définit peut-être le bien et le mal différemment, mais ces catégories existent pour pratiquement tout le monde, et c’est ça qui fonde n’importe quel système judiciaire dans n’importe quelle société à n’importe quelle époque. C’est ce qu'on appelle le « sens moral ».

Mais non seulement on a intuitivement cette idée que le bien et le mal existent, mais en plus, la grande majorité des gens sont plutôt d’accord au fond que certaines choses sont mauvaises et d’autres sont bonnes. Voler, mentir, assassiner, exploiter, torturer, ce n’est pas bien, on n’aimerait pas qu’on nous le fasse. Mais nourrir, encourager, aider, soigner, protéger, ça c’est bien, on ne serait pas contre qu’on nous le fasse !

Donc l’apôtre Paul dit que même les gens qui n’ont jamais lu la Bible, qui n’ont jamais rencontré un Juif ou un chrétien, et qui appartiennent même à une autre religion et qui rendent un culte à des faux dieux—même eux qui pèchent « sans la loi » (v. 12) pèchent quand même dans un certain sens sous la loi, ou sous une forme de la loi, puisqu’ils en savent assez intuitivement pour être accusés ou défendus dans leur conscience (v. 15).

Et ça, ça sera clairement manifesté au jour du jugement dernier (v. 16). Paul veut dire qu’au jour du jugement, les païens se rendront compte qu’à chaque fois qu’ils étouffaient leur conscience pour faire quelque chose qu’ils savaient au fond être mal, c’était en fait la loi de Dieu imprimée sur leur cœur qu’ils étaient en train d’enfreindre. Et ça, ça leur sera reproché.

Tout ça pour dire qu’on ne peut pas se contenter d’ignorer la loi de Dieu. Puisque tout le monde est visé par la loi de Dieu (ceux qui ont la loi et ceux qui ne l’ont pas), eh bien il faut qu’on prenne connaissance de cette loi, non ? Ça semble logique !

Est-ce que vous pouvez imaginer prendre le volant d’une voiture sans connaître le code de la route ? Et une fois que quelqu’un vous a fait remarquer que pour garder ses points sur son permis, et même pour ne pas aller en prison, il faut respecter le code de la route, est-ce que vous allez continuer à vous dire : « Bof, ce n’est pas grave, je vais continuer d’essayer de deviner ce que veulent dire les panneaux » ?

Certes, avec un peu de bon sens, vous n’allez pas avoir un accident à chaque coin de rue, mais quand même, logiquement, si vous voulez optimiser votre conduite, vous allez vous intéresser au code de la route, et vous allez essayer de l’apprendre, et vous allez essayer de le respecter.

Et dans notre texte, l’apôtre Paul dit que « ceux qui pratiquent la loi seront justifiés », et que la loi vise déjà tout le monde même si on n’y connaît strictement rien, et que personne ne peut plaider l’excuse de ne pas être au courant qu’il y a un Dieu et une loi. Est-ce qu’on peut sincèrement continuer comme ça en se fichant complètement de connaître cette loi ?

Bien sûr que non. Et ce que ça veut dire pour nous, c’est qu’on devrait tous lire la Bible, venir à l’église, écouter le pasteur, et s’éduquer dans la connaissance des exigences de Dieu pour les humains. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles chaque dimanche, il y a un élément dans notre culte qu’on appelle la « loi de Dieu », où on se replace devant certaines de ces exigences morales de Dieu. On doit les connaître.

2/ Le péril de la connaissance (v. 17-24)

Mais. Si on ne peut pas se contenter d’ignorer la loi de Dieu, on ne peut pas non plus se contenter de connaître la loi de Dieu. C’est le deuxième point. Après le péril de l’ignorance, le péril de la connaissance.

Regardez le texte de nouveau (v. 17-24). Paul a établi ce principe de base : c’est que la loi de Dieu s’applique à tout le monde puisque « ceux qui pratiquent la loi seront justifiés. » Il a ensuite fait une application à un groupe de gens en particulier : les païens. Et maintenant, il fait une application à un autre groupe de gens en particulier : les Juifs, comme il les appelle.

Et voici ce qu’il dit. Il dit : « Vous, les Juifs, c’est-à-dire les Israélites, contrairement aux païens, vous connaissez bien la loi de Dieu, et même vous en êtes très fiers. Vous avez tendance à vous en vanter, et à faire savoir à tout le monde que vous êtes les gardiens en quelque sorte de cette révélation que Dieu a donnée aux hommes par Moïse et les prophètes. Mais en même temps, vous ne respectez pas cette loi ! Et les gens le voient ! Ils voient ce décalage entre ce que vous dites et ce que vous faites, et du coup, vous avez un très mauvais témoignage auprès des païens, vous décrédibilisez votre religion, et vous déshonorez Dieu. »

On imaginait tout-à-l’heure quelqu’un qui jouerait au tennis sans connaître les règles. Cette personne-là enfreindrait les règles par ignorance. Mais si quelqu’un enfreint les règles alors qu’il les connaît, ce n’est pas tout-à-fait pareil : c’est de la triche ! Même si l’infraction (ou la transgression) est la même dans l’absolu, c’est particulièrement odieux quand c’est le spécialiste des règles qui ne les respecte pas. C’est choquant.

Et en fait, ce reproche que Dieu fait aux gens qui se disent croyants, qui connaissent sa parole, mais qui ne se l’appliquent pas à eux-mêmes, ce n’est pas nouveau. Dans le Psaume 50 (écrit plusieurs siècles avant l’époque de Jésus et des apôtres), il est dit ceci :

« Dieu dit au méchant : Quoi donc ! Tu énumères mes prescriptions, et tu as mon alliance à la bouche, toi qui détestes l’instruction, et qui jettes mes paroles derrière toi ! Si tu vois un voleur, tu te plais avec lui, et ta part est avec les adultères. Tu livres ta bouche au mal, et ta langue tisse la tromperie. Tu t’assieds et tu parles contre ton frère, tu diffames le fils de ta mère. » (Ps 50.16-20)

Vous voyez, on ne peut pas se contenter de connaître la loi de Dieu. Il faut encore se l’enseigner à soi-même, c’est-à-dire se l’appliquer à soi-même, sans quoi (si on se dit croyant) on est vraiment en train d’attirer le scandale sur Dieu.

L’actualité nous en donne un exemple flagrant. Il y a une dizaine de jours, une commission indépendante présidée par Jean-Marc Sauvé a publié son rapport sur les violences sexuelles dans l’Église catholique en France entre 1950 et 2020. Ça a été très médiatisé. Conclusions du rapport : 216 000 victimes d’agressions par un membre du clergé, 330 000 si on ajoute les victimes d’agressions par des laïcs à l’intérieur de l’institution. Âge moyen des victimes : entre 10 et 11 ans. Nombre d’agresseurs membres du clergé sur cette période : entre 2 900 et 3 200. Ce qui fait de l’Église catholique, statistiquement, le milieu en France le plus propice aux violences sexuelles, après le cadre familial.

On parle de l’Église catholique, parce que c’est une grosse institution en France. Mais n’allez pas croire que ça n’existe pas chez les protestants. Il suffit de jeter un coup d’œil du côté du monde anglo-saxon, où l’Église protestante est beaucoup plus développée, pour découvrir des choses très similaires.

Le théologien Jean Calvin dit ceci :

« Voilà une chose par trop insupportable, que ceux qui empruntent leur gloire de Dieu, donnent une note d’ignominie à son nom saint et sacré ! »

Le pape François a exprimé sa « honte » devant les conclusions du rapport Sauvé. Mais au-delà du pape François, c’est sur Dieu lui-même que la honte est jetée quand ceux qui disent lui rendre un culte transgressent sa loi.

Et dans notre passage, l’apôtre Paul parle de ceux qui sont réputés spécialistes de la foi, mais qui attirent le déshonneur sur le nom de Dieu par la manière dont ils vivent. Il parle des « Juifs », mais ça nous vise nous aujourd’hui qui disons être des croyants et qui sommes les dépositaires de la loi de Dieu consignée dans la Bible.

« On est des chrétiens, nous ! On connaît Dieu, on connaît les Saintes Écritures, on peut proposer des Parcours Découverte à nos amis, parce que nous, on a la vérité et on peut éclairer le monde avec ! » Ce n’est pas vrai ?

Mais toi qui prêches de ne pas dérober, les gens savent que tu télécharges des films ou des jeux illégalement. Toi qui dis de ne pas commettre adultère, les gens savent que tu regardes des séries où il y a de la nudité et de l’impudicité explicites. Toi qui as horreur des idoles, les gens voient que tu sèches le culte le jour du Seigneur pour faire la fête avec tes amis. Toi qui enseignes à tes enfants d’être doux et aimables, ils t’entendent t’emporter contre ton conjoint.

Et toi qui fais la leçon à la communauté de l’Église Lyon Gerland depuis ton pupitre de prédicateur, les gens voient aussi les incohérences de ta propre vie. « Toi qui enseignes les autres, tu ne t’enseignes pas toi-même ! »

Alors la solution, bien sûr, ne consiste pas à cacher nos incohérences, c’est-à-dire à continuer de transgresser la loi, mais à le faire en toute discrétion pour ne pas scandaliser les gens et déshonorer Dieu ! La solution ne consiste pas à préserver les apparences (et on va y revenir dans le troisième point).

La solution consiste à prendre à cœur la loi de Dieu, à « s’enseigner soi-même », comme dit l’apôtre Paul. Il faut étudier la loi de Dieu, réfléchir à sa loi, et s’examiner et s’éprouver soi-même en permanence à la lumière de sa loi. Il faut recevoir cette lumière sans chercher à s’y dérober. Il faut accueillir les exigences de Dieu comme des serviteurs dociles qui accueillent les instructions de leur bon maître. On ne peut pas se contenter de connaître la loi de Dieu, il faut encore la mettre en pratique, comme l’a dit Jésus :

« Celui donc qui violera l’un de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire de même, sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux, mais celui qui les mettra en pratique et qui les enseignera, celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux. […] Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait. » (Mt 5.19, 48)

3/ Le péril de l’apparence (v. 25-29)

Alors c’est bon ? C’est parti ? Rassurez-vous, il y a un troisième point. On a parlé du péril de l’ignorance, puis du péril de la connaissance. Maintenant, troisièmement : le péril de l’apparence. Paul veut nous faire comprendre, pour terminer, qu’on ne peut pas se contenter d’obéir extérieurement à la loi de Dieu.

Revenons au texte (v. 25-29). Maintenant, l’apôtre Paul va pousser encore un peu plus loin son raisonnement. Il a parlé des païens qui ignoraient la loi de Dieu, et il a dit que ça, ce n’était pas satisfaisant. Ensuite, il a parlé des Juifs qui connaissaient bien la loi mais qui la transgressaient quand même, et il a dit que ça, ce n’était pas satisfaisant. Et maintenant, il continue de parler des gens qui connaissent bien la loi, mais il va se concentrer sur un signe religieux extérieur, qui représente en fait l’adhésion extérieure à la loi, c’est-à-dire l’apparence de l’obéissance. Et il va dire que ça non plus, ce n’est pas satisfaisant.

Ce signe religieux, c’est (dans notre texte) la circoncision. C’est le signe emblématique, dans l’histoire d’Israël, qui démarquait le peuple de Dieu du reste du monde. Et ce que Paul est en train de dire ici, c’est qu’il existe une manière d’avoir seulement une apparence de loyauté à Dieu, une apparence de consécration et d’obéissance à la loi de Dieu.

Et pour faire ça, il suffit d’obéir à la loi à la lettre. On ne tue personne, on ne commet pas d’adultère, on ne vole pas, on ne ment pas, et on accomplit tous les rites religieux en vigueur, et on se dit : « C’est bon, je suis fidèle. » En fait, je pense qu’on est à peu près tous dans ce cas-là, non ?

Sauf que là où Paul veut en venir, c’est que la lettre de la loi, ce n’est pas toute la loi.

Jésus lui-même l’a dit dans le même passage qu’on a cité tout-à-l’heure :

« Vous avez entendu qu’il a été dit aux anciens : Tu ne commettras pas de meurtre, celui qui commet un meurtre sera passible du jugement. Mais moi, je vous dis : Quiconque se met en colère contre son frère sera passible du jugement. » (Mt 5.21-22)

Ou encore :

« Vous avez entendu qu’il a été dit : Tu ne commettras pas d’adultère. Mais moi, je vous dis : Quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis adultère avec elle dans son cœur. » (Mt 5.27-28)

Obéir seulement à la lettre de la loi, ce n’est pas, en fait, obéir pleinement à la loi. Et Paul dans notre passage dit qu’on peut même imaginer des païens (des incirconcis) qui, dans un sens, obéiraient mieux à la loi que des Juifs (des circoncis)—parce que, même s’ils n’ont pas la lettre de la loi, on peut imaginer qu’ils puissent obéir à l’esprit de la loi. Ce que les Juifs légalistes, qui se contentaient d’une adhésion extérieure à la loi, ne faisaient pas.

Je me rappelle avoir vu une vidéo un jour sur un réseau social—vous savez, ce genre de vidéo, vous ne savez pas trop d’où ça sort, et ça apparaît sur votre fil d’actualités, et ça se lance tout seul, et ça pique votre curiosité, alors vous regardez ça et vous vous rendez compte après coup que vous venez de perdre trois ou quatre minutes de votre vie ! Bref, j’ai vu une vidéo où un agent de police essayait d’arrêter quelqu’un de très agité, et de lui mettre les menottes, mais il n’y arrivait pas, et c’est un passant qui est venu l’aider en lui expliquant et en lui montrant comment faire pour immobiliser le suspect. C’était quelqu’un, manifestement, qui avait de l’entraînement en techniques de self-défense.

Ce qui était frappant, c’était que le bonhomme avec le badge et l’uniforme ne remplissait pas son rôle, et c’est le bonhomme qui n’avait ni badge ni uniforme qui lui a montré comment faire. Et dans notre texte, c’est un peu pareil : à quoi ça sert d’avoir le badge, si tu n’assumes pas ce que le badge représente ? Le plus important, ce n’est pas d’avoir le badge, mais d’accomplir ta mission (signifiée ou représentée par ton badge), et il y en a qui n’ont pas le badge et qui accomplissent mieux ta mission que toi.

Mais attention, Paul n’est pas en train de dire que les païens sont mieux placés que les Juifs pour obéir à Dieu. Il est seulement en train de dire qu’avoir le badge et l’uniforme, ce n’est pas tout. On ne peut pas se contenter d’obéir extérieurement à la loi de Dieu.

Paul est en train de renvoyer tout le monde, ici, circoncis et incirconcis, Juifs et païens, ceux qui ont la loi et ceux qui n’ont pas la loi, croyants et non-croyants—Paul les renvoie tous vers une autre réalité qui est une réalité intérieure. Et cette réalité intérieure, il l’appelle : « la circoncision du cœur. » (v. 29)

Écoutez bien, parce que c’est très important. L’apôtre Paul est en train de dire que le vrai Juif, c’est-à-dire celui qui comprend vraiment la loi de Dieu, a compris que la loi devait le conduire à rechercher cette réalité intérieure, qui n’est pas que la lettre de la loi (c’est-à-dire l’obéissance extérieure), mais qui est plus que la lettre (c’est-à-dire un changement intérieur).

Et le vrai Juif, qui connait bien la loi de Dieu, sait d’où vient cette expression : « la circoncision du cœur ». Elle vient de la loi ! On l’a vu tout-à-l’heure dans le culte. L’Éternel a dit aux Israélites, par l’intermédiaire de Moïse :

« Vous circoncirez votre cœur et vous ne raidirez plus votre nuque. » (Dt 10.16)

Circoncire son cœur, ça veut dire faire l’expérience d’un changement radical à l’intérieur. Ça veut dire s’humilier intérieurement, reconnaître qu’on n’arrive pas à obéir pleinement à la loi de Dieu, et s’attendre à la miséricorde et au secours de Dieu. Circoncire son cœur, ça veut dire devenir pleinement docile devant Dieu.

Mais comme cette attitude-là, elle ne nous vient pas naturellement, eh bien l’Éternel finit par dire aux Israélites, toujours dans la loi, toujours par l’intermédiaire de Moïse :

« L’Éternel, ton Dieu, circoncira ton cœur et le cœur de ta descendance, pour que tu aimes l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur et de toute ton âme, afin que tu vives. » (Dt 30.6)

Donc l’apôtre Paul, il est très malin, parce qu’il se réfère à la loi de Dieu pour montrer aux gens qu’on ne peut pas se contenter d’ignorer la loi, mais qu’on ne peut pas non plus se contenter de la connaître, ni de lui obéir extérieurement.

La loi, en fait, prévoit qu’on n’arrive pas à l’accomplir parfaitement ! La loi prévoit qu’on ait besoin de la miséricorde de Dieu. La loi prévoit qu’on soit abattu et humilié dans notre cœur devant notre incapacité à satisfaire les exigences de Dieu. Le but de la loi est de nous dépouiller de toute prétention et de nous mettre à genoux devant Dieu, sachant qu’il a promis—dans la loi—d’accomplir pour nous cette œuvre intérieure, cette opération du cœur, qui nous permettra de l’aimer et de nous attacher à lui pour toujours.

L’apôtre Paul dit, dans un autre passage :

« Ce qui compte, ce n’est  ni la circoncision ni l’incirconcision, mais c’est d’être une nouvelle créature. » (Ga 6.15)

Et dans un autre passage encore :

« Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. » (2 Co 5.17)

Et encore dans un autre :

« En [Christ] vous avez été circoncis d’une circoncision qui n’est pas faite par la main des hommes ; c’est-à-dire le dépouillement du corps de la chair [c’est-à-dire le dépouillement de l’ancienne nature] ; la circoncision du Christ. » (Col 2.11)

Mes amis, je vais le dire très simplement : la loi de Dieu doit nous conduire à Christ. En effet, on ne peut pas se contenter d’ignorer la loi, on ne peut pas se contenter de connaître la loi, on ne peut pas se contenter de lui obéir en apparence—on doit l’étudier, la prendre à cœur, et en tirer tous les enseignements. Et quand on va faire ça, on va se rendre compte qu’on a désespérément besoin d’être secouru—et ça va nous conduire à Christ.

Je vous rappelle que c’est le but de l’apôtre Paul, dans cette section de sa lettre. Il veut nous montrer qu’on est perdu et qu’on a besoin d’être sauvé. Et il ne le dit pas ici, mais un peu après, il nous montrera comment Dieu est intervenu lui-même pour sauver des gens et pour accomplir au profit des croyants ce que les croyants ne pouvaient pas accomplir eux-mêmes.

Jésus en effet, qui est Dieu incarné (Dieu fait homme), a obéi parfaitement à la loi de Dieu. Il est le seul être humain à avoir pratiqué la loi au point d’être estimé juste par Dieu. Et il s’est offert volontairement sur la croix pour se substituer à une multitude d’êtres humains coupables, et incapables d’obtenir leur justification par l’obéissance à la loi. Jésus a pris sur lui leur injustice, et il leur offre en échange sa justice. Et si vous et moi, on place notre confiance en Jésus, c’est le signe que Dieu a circoncis notre cœur. « La louange de ce Juif ne vient pas des hommes, mais de Dieu. » (v. 29) Parce qu’on est devenu juste aux yeux de Dieu en vertu de la transaction opérée par Jésus sur la croix.

Un peu plus loin dans l’épître aux Romains, Paul dit ceci : « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Christ-Jésus. […] [La loi ne pouvait pas nous sauver, parce que la chair—la nature humaine déchue—la rendait sans force.] [Mais] Dieu, en envoyant à cause du péché son propre Fils dans une chair semblable à celle du péché, a condamné le péché dans la chair ; et cela, pour que la justice prescrite par la loi soit accomplie en nous. » (Rm 8.1-4)

Finalement, on pourrait résumer le message de notre texte, en disant : « Au nom de la loi, tournez-vous vers Christ ! »

Pour terminer rapidement. Si on veut bien comprendre pourquoi on a besoin d’être sauvé, et comment on peut être sauvé, il faut qu’on s’intéresse à la loi de Dieu, et surtout, il faut qu’on en tire les bons enseignements. C’est ce qu’on a vu aujourd’hui.

Ne méprisons pas la loi de Dieu. Lisons et étudions avec intérêt tous ces commandements que Dieu a voulu nous révéler. Ils nous parlent de la justice de Dieu. Ils nous parlent de son caractère. Ils nous parlent de ce qui est bien et de ce qui est mal dans la vie. On peut commencer par apprendre par cœur les Dix Commandements, si vous ne l’avez pas encore fait. Et puis je vous conseille vivement la lecture du Grand Catéchisme de Westminster qui propose des développements très intéressants sur chaque commandement.

Mais ne nous limitons pas à connaître la loi de Dieu. Accueillons-la de bon cœur dans notre vie. Réfléchissons à comment la mettre en pratique. Examinons-nous perpétuellement à sa lumière. Encourageons-nous les uns les autres à la pratique des bonnes œuvres.

Mais ne nous arrêtons pas à une apparence de piété, à une religion de surface, à une obéissance extérieure. Ne fuyons pas la lumière de la loi de Dieu quand elle se pose sur des recoins de notre vie qu’on aimerait garder dans les ténèbres. Ne résistons pas à l’humiliation que Dieu veut opérer en nous pour qu’on se tourne ensuite vers lui afin de recevoir sa grâce. La peine que nous procurent nos péchés, c’est bon signe. Que cette peine nous fasse sentir combien on a besoin de Jésus—mort et ressuscité pour nous—et qu’elle conduise ensuite à la joie de notre salut.

Et que la joie de notre salut, à son tour, produise en nous une reconnaissance débordante à Dieu, et de l’amour pour sa loi !

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