Et maintenant ?

Par Alexandre Sarranle 24 mars 2024

Si vous n’avez pas vraiment l’habitude d’assister aux réunions des Églises chrétiennes, comme celle de ce matin par exemple, eh bien il est possible que vous trouviez que ce que les chrétiens font dans ces réunions… est un peu bizarre ! On lit des textes qui sont tirés d’un livre très, très ancien. On ferme les yeux et on parle à un être invisible. Des fois, on organise des cérémonies rituelles où on mouille des gens. Bizarre !

Mais peut-être que ça fait longtemps que vous êtes chrétien et que vous allez à l’Église le dimanche, et donc, vous vous êtes habitué à ce genre de chose. Pourtant, vous avez sûrement pu remarquer que d’une Église à l’autre – entre l’Église catholique romaine et l’Église protestante, et même d’une Église protestante évangélique à une autre – eh bien on fait des choses différentes, et peut-être bien qu’il y a des choses qui peuvent encore vous sembler bizarres, ici-même à l’Église Lyon Gerland, alors que vous avez plusieurs décennies d’expérience de la vie chrétienne derrière vous, et que vous avez peut-être déjà visité des dizaines d’Églises différentes. Mais ici, à Gerland, il y a quand même des trucs qu’on fait qui vous semblent vraiment étranges. Je ne sais pas, moi – par exemple administrer le baptême à des tout petits bébés ! Vous n’avez jamais vu ça !

Ça tombe bien, c’est ce qu’on va faire aujourd’hui. Mais avant ça, on va lire un texte tiré de ce livre très, très ancien qu’est la Bible – un texte qui se trouve à la toute fin d’une des biographies de Jésus qui sont contenues dans la Bible. Il y a quatre récits dans la Bible qui rapportent la vie de Jésus sur la terre, qu’on appelle des « Évangiles » : leurs auteurs sont Matthieu, Marc, Luc et Jean. On va lire la toute fin du premier de ces Évangiles, qui a été écrit par un des douze apôtres de Jésus : Matthieu.

Et ce texte vise à répondre à la question suivante : « Et maintenant ? » D’après le récit, Jésus est né, il a grandi, il a enseigné, il a souffert, il est mort sur la croix, il est ressuscité le troisième jour… et maintenant ? Jésus s’est présenté comme l’envoyé de Dieu ; l’auteur nous a bien fait comprendre dans son récit que Jésus, c’était le messie promis, le messie attendu, celui qui devait être – et qui est – le chef du peuple de Dieu. Et dans le récit de sa vie, on a appris que Jésus avait confié à ses apôtres un rôle très important qui consistait à poser le fondement de cette communauté appelée « l’Église », constituée de tous les gens qui invoquent le nom de l’Éternel en se ralliant au messie.

Et maintenant ? Qu’est-ce qu’elle est censée faire, cette Église ? À quoi est-ce qu’elle sert, sur la terre ? Et comment est-ce que l’Église doit décider ce qu’elle va faire ou ne pas faire, et notamment dans le cadre du culte ? Très concrètement, par exemple : d’où ça vient, l’idée de faire une cérémonie rituelle où on mouille quelqu’un ?

Eh bien ce texte qu’on va lire est là, justement, pour fixer une sorte de feuille de route pour l’Église chrétienne. Ça vient à la fin de l’Évangile selon Matthieu, justement pour mettre en évidence quels sont les ordres de mission de l’Église chrétienne – cette communauté qui se rallie autour de Jésus et qui se réclame de lui. Qu’est-ce que l’Église chrétienne est censée faire ? D’où viennent ses ordres de mission ? Pourquoi est-ce qu’on peut trouver des choses très, très bizarres – justement – qui se passent dans les réunions de l’Église chrétienne ?

Eh bien la réponse se trouve ici, sous forme résumée, dans ces quelques versets. Toute la leçon à retenir pour nous est la suivante : l’Église chrétienne, et donc notre Église, l’Église Lyon Gerland doit obéir à celui qui en est le fondateur et le chef, à savoir Jésus-Christ. Si Jésus nous a dit de faire quelque chose en tant qu’Église, on doit le faire, peu importe si ça a l’air bizarre – et s’il ne nous a pas dit de faire quelque chose en tant qu’Église, on ne doit pas le faire, même si on aurait très envie de le faire !

Et ça, comme on va le voir, évidemment, ça s’applique particulièrement au culte (c’est-à-dire quand les chrétiens se réunissent publiquement pour adorer Dieu, comme ce matin). Et ça s’applique particulièrement aux sacrements (les rites que Jésus a institués pour l’Église chrétienne, et qui sont au nombre de deux : le baptême et la sainte cène).

1/ Le statut du chef de l’Église (v. 16-8)

Alors premièrement, le statut du chef de l’Église. La première chose qu’on voit dans ce texte, c’est que l’Église Lyon Gerland a pour chef… le maître de l’univers. Oui, oui, vous m’avez bien entendu : notre Église a pour chef quelqu’un qui est réellement le maître de l’univers.

Dans le texte, on voit que Jésus retrouve ses disciples après sa résurrection. Il y en a onze au lieu de douze, parce qu’il y en a un qui n’est plus là, c’est Judas qui avait trahi Jésus, et qui s’est donné la mort. Et l’auteur nous rapporte plusieurs choses qui doivent nous frapper.

D’abord, il dit que les disciples en le voyant, l’adorent (v. 17). Ce n’est pas anodin, parce que ce terme, « adorer », ça désigne normalement quelque chose qu’on ne doit faire qu’avec Dieu. Au début de l’Évangile de Matthieu, il y a un épisode où le diable vient voir Jésus et promet de lui donner tous les royaumes du monde, s’il se prosterne devant lui et l’adore. Mais Jésus lui répond :

« Retire-toi Satan, car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et à lui seul, tu rendras un culte. » (Mt 4.9-10, cf. Dt 6.13).

Or ici, dans notre passage, les disciples adorent Jésus, et Jésus ne leur dit pas : « Ah non, on n’adore que Dieu ! ». Vous savez, parfois, on dit : « Oh là là, j’adore les pizzas à l’ananas », et des fois, on a un ami chrétien pénible qui répond : « Tss, tss, on n’adore que Dieu ! » Bon, en français, quand on dit « j’adore », on veut généralement dire qu’on aime trop, trop. Mais là, dans notre texte, ça ne veut pas dire juste que les disciples « aiment trop, trop Jésus ». Non, ça veut littéralement dire qu’ils l’adorent, ils lui rendent un culte, ils se prosternent. Si vous me disiez que vous vous prosternez devant les pizzas à l’ananas, je me ferais du souci pour vous. Mais Jésus ne dit pas à ses disciples : « Stop, on n’adore que Dieu ! » En ne disant rien, il accepte cette adoration et assume implicitement le fait d’être Dieu.

Mais quelques-uns ont des doutes, nous dit l’auteur. Et franchement, c’est assez normal. Ils croient que Jésus est ressuscité, puisqu’il est là, sous leurs yeux ; et ils ont une bonne théologie à la base, ils croient que rien n’est impossible à Dieu. Mais vraiment, croire que cet homme, en chair et en os, qui se tient devant eux et qu’ils peuvent entendre et toucher – croire que cet homme est Dieu et qu’il est digne qu’on lui rende un culte ? Là, c’est un peu compliqué quand même. Pourtant, il ne fait aucun doute dans l’esprit de l’auteur (qui était présent à ce moment-là, et qui sait, peut-être qu’il faisait partie de ceux qui avaient des doutes !) – il ne fait aucun doute dans son esprit maintenant, au moment où il écrit, que Jésus est réellement Dieu qui a pris, en plus de sa nature divine, une nature humaine.

Et ensuite, il rapporte les paroles de Jésus :

« Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. » (v. 18)

Alors en fait, ça peut sembler un peu curieux cette affirmation, puisqu’on vient d’établir que Jésus était Dieu. Comment est-ce qu’on peut donner du pouvoir à Dieu ? En fait, le « pouvoir », ici, ce n’est pas une notion de « puissance », mais c’est une notion « d’autorité ». « Toute autorité m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. » Et ça, ça doit se comprendre sous l’angle de la nature humaine de Jésus.

Jésus en tant qu’homme, est en train de dire : « Voilà, je suis né parmi vous, j’ai grandi, j’ai enseigné les voies de Dieu, j’ai souffert, je suis mort sur la croix volontairement pour détourner sur moi-même la peine de vos péchés (et la peine des péchés de tous ceux qui se confient en moi), et je suis ressuscité le troisième jour en vainqueur sur le mal et sur la mort – et maintenant je vais vous quitter, et je vais monter au ciel m’asseoir à la droite de Dieu le Père, pour régner. Je vais m’asseoir sur un trône dans le ciel – pourquoi ? Parce que c’est le statut qui m’a été donné. Toute autorité m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. L’univers tout entier a été placé sous ma juridiction. »

Littéralement, donc, Jésus est le maître de l’univers. Il est Dieu par nature, donc il était déjà le créateur tout puissant de l’univers – et il a pris la nature d’un homme, qui à l’issue de son passage sur la terre, après voir accompli sa mission, a été élevé dans la gloire.

« Après avoir accompli la purification des péchés, il s’est assis à la droite de la majesté divine dans les lieux très-hauts. » (Hé 1.3)

Et en fait, il faut bien comprendre que ce texte a été écrit avant tout à destination d’un public juif. Tout au long de l’Évangile selon Matthieu, il y a plein de références qui sont faites aux textes de l’Ancien Testament (la partie de la Bible qui a été écrite avant Jésus), pour montrer que le projet de Dieu qui avait été annoncé par les prophètes était en train de s’accomplir exactement comme Dieu l’avait promis. Tout particulièrement, le but de Matthieu est de montrer à ses lecteurs que Jésus est bien le messie qui avait été promis.

Et les Juifs qui connaissaient bien l’Ancien Testament auraient tout de suite pensé à une prophétie très connue qui concernait le messie, qu’on trouve dans le livre du prophète Daniel (500 ans avant la naissance de Jésus). C’est une vision que le prophète Daniel avait eue, où il y avait le messie, justement, qui s’approchait de Dieu dans le ciel, et le texte dit :

« On lui donna la domination, l’honneur et la royauté ; et tous les peuples, les nations et les hommes de toutes langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle qui ne passera pas, et sa royauté ne sera jamais détruite. » (Dn 7.14)

Voilà, notre passage est tout simplement en train de nous dire que Jésus est bel et bien le messie, et qu’il a accompli sa mission, et qu’il s’est assis sur le trône du monde entier. Bref, l’Église Lyon Gerland a pour chef… le maître de l’univers !

C’est vite dit, mais est-ce qu’on y croit ? Quand on pense au « maître de l’univers », est-ce qu’on pense au dessin animé des années 1980 avec Musclor et Skeletor – on imagine un genre de super-héros, quelqu’un avec une force exceptionnelle et des super-pouvoirs, un homme augmenté, quoi ? Est-ce qu’on pense à un sportif qui aurait tout gagné dans son sport et dans sa catégorie, le gars qu’on appelle de nos jours le « GOAT », à partir de l’anglais : « the greatest of all time » ? Est-ce que Jésus est comme ça ?

En fait non. Jésus est infiniment plus que ça. Il est littéralement le roi du cosmos – il est la plus haute autorité qui existe, toutes choses lui sont soumises, des plus petites particules aux plus grandes galaxies, la végétation, les animaux, le climat, Vladimir Poutine, Joe Biden, Emmanuel Macron, l’Assemblée Nationale, le Sénat, le patron de votre entreprise, le directeur de votre école, vos collègues, vos profs, vos amis, vos voisins, vous et moi… on est tous sous la juridiction de Jésus. Comme le dit aussi l’apôtre Paul :

« Dieu a mis sa force en action dans le Christ, en le ressuscitant d’entre les morts et en le faisant asseoir à sa droite dans les lieux célestes, au-dessus de toute principauté, autorité, puissance, souveraineté, au-dessus de tout nom qui peut se nommer, non seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle à venir. Il a tout mis sous ses pieds et l’a donné pour chef suprême à l’Église. » (Ép 1.20-22)

Il est au-dessus de tout, et il est notre chef. Bienvenue à l’Église Lyon Gerland, voici notre organigramme : tout en haut, il y a notre chef, c’est le maître de l’univers. Vous ne le savez peut-être pas encore, mais c’est votre maître, aussi. Et donc en venant ici, vous devriez vous attendre à ce qu’on reçoive nos ordres de lui. Ça paraît normal !

2/ Les ordres du chef de l’Église (v. 19)

Ce qui nous amène au deuxième point : les ordres du chef de l’Église. La deuxième chose qu’on voit dans ce texte, c’est que l’Église Lyon Gerland a reçu pour instructions de la part de Jésus de rassembler des gens de toutes les nations et de leur enseigner la foi.

On veut se concentrer là sur le verset 19 et sur la première partie du verset 20. C’est une parole de Jésus que beaucoup de gens, s’ils sont chrétiens depuis quelques années, connaissent bien. Mais pour bien comprendre ce que Jésus dit, il faut bien comprendre la construction de sa phrase dans la langue originale, et pas seulement la traduction en français. Le texte a été écrit en grec, et il y a un verbe principal à l’impératif, et deux participes présent qui introduisent des propositions subordonnées.

Littéralement : « Faites des disciples de toutes les nations, les baptisant… et leur enseignant à garder tout ce que je vous ai prescrit. » « Faites des disciples » est un seul mot en grec ; c’est le verbe à l’impératif. « Baptisant », et « Enseignant » sont les participes présents, qui introduisent des propositions subordonnées, qui elles-mêmes se rapportent au sujet du verbe « faire des disciples ». Autrement dit : « Vous, les onze à qui je parle, vous devez discipler les nations. De la même façon que moi, je vous ai pris avec moi pour faire de vous des disciples, vous aussi, vous devez accueillir des gens de toutes les nations pour faire d’eux des disciples, et dans ce processus, vous allez les baptiser et vous allez leur enseigner mes voies. »

Quand Jésus dit : « toutes les nations », il faut aussi bien comprendre que c’est une expression très significative pour les premiers destinataires qui sont des croyants d’origine juive. « Toutes les nations », ça veut dire des gens de toutes origine y compris des non-juifs. Pour nous, « toutes les nations », ça évoque simplement la grande diversité des humains dans le monde entier, mais pour quelqu’un d’origine juive, ça évoquait quelque chose d’un peu différent. Ça voulait dire que le messie ouvrait réellement les portes de son royaume à tous les peuples, alors qu’avant, ce royaume se concentrait sur Israël.

Vous vous rappelez la prophétie du prophète Daniel :

« Tous les peuples, les nations et les hommes de toutes langues le servirent. » (Dn 7.14)

Jésus est réellement ce messie, il a accompli sa mission, il s’est assis sur le trône de l’univers, et maintenant les peuples du monde entier sont invités à se rallier à lui, et cette invitation leur est présentée par l’Église.

Là où je veux en venir, c’est que Jésus a donné des ordres assez précis à l’Église à travers ses apôtres (qui ont pour fonction de poser le fondement de l’Église chrétienne, comme je l’ai dit en introduction) – mais il faut être précis pour comprendre ces ordres qui sont précis !

Les ordres de mission qu’on a reçus de la part de Jésus, donc, c’est essentiellement d’incorporer dans notre communauté des gens issus de tous les peuples afin qu’ils soient faits disciples de Jésus – c’est-à-dire pour qu’ils soient des élèves de Jésus, des apprenants, des étudiants de Jésus.

C’est comme quand vous démarrez des études. Vous rejoignez une école, et dès votre inscription, même si vous n’avez pas encore assisté à un seul cours – dès que votre inscription est enregistrée, vous êtes officiellement appelé un « étudiant » de cette discipline. Vous êtes « science piste » dès que vous êtes admis à Sciences Po, même avant d’assister au premier cours – ou de sécher votre premier cours. Vous êtes « étudiant en musicologie » dès que votre inscription est enregistrée sur internet, avant même votre première rentrée.

De la même façon, on est « disciple » de Jésus dès notre incorporation dans la communauté chrétienne et dès le tout début de notre cheminement de foi dans cette communauté qui se réclame de Jésus, le messie.

Et donc quand Jésus que l’Église doit incorporer des gens issus de toutes les nations, « les baptisant » et « leur enseignant » ses voies, il veut dire que le baptême doit marquer l’entrée ou l’incorporation de quelqu’un dans la communauté ; et l’enseignement des voies de Jésus doit caractériser tout le cheminement qui va suivre pour cette personne. Voilà pourquoi les Église chrétiennes baptisent des gens, et lisent et étudient ce livre très, très ancien qu’est la Bible. Parce que Jésus a dit qu’il fallait le faire !

Bien sûr, il y a une question qui se pose. Qui doit recevoir le baptême, du coup ? C’est qui, les gens qu’on doit mouiller lors de cette cérémonie rituelle bizarre qu’on appelle le baptême ? La réponse devrait nous paraître évidente, comme elle a dû paraître évidente aux premiers destinataires de ce texte : c’est toutes les personnes qui rejoignent la communauté du messie Jésus-Christ, et qui entament ce chemin d’apprentissage selon les voies de Jésus.

Et donc vous me voyez arriver avec mes gros sabots, mais je me dois de faire cette précision. Est-ce que les personnes qui entrent dans la communauté chrétienne de par leur naissance ou leur adoption dans une famille chrétienne – est-ce que ces enfants, ces bébés, doivent être considérés comme des élèves de l’école de Jésus ? Oui, bien sûr ! Ils font partie de la communauté, non ? Qu’est-ce qu’ils seraient, sinon ? Des intrus ou des étrangers parmi nous ? Nos tout petits enfants sont inscrits à l’école de Jésus, même s’ils n’ont encore jamais assisté à un seul cours – mais ils sont inscrits en raison de la providence de Dieu qui les a fait naître dans une famille chrétienne et donc dans la communauté chrétienne. Ils y sont, et donc ils ont droit à leur carte d’étudiant qui va leur signaler et nous signaler qu’ils sont ici chez eux.

Remettez-vous encore une fois, si possible, à la place d’un croyant d’origine juive qui découvre ces paroles de Jésus. « Baptiser », pour lui, ça veut dire accomplir un rituel avec de l’eau, qui représente symboliquement la purification des péchés promise par Dieu à son peuple, selon sa grâce. Dieu avait dit par le prophète Ézéchiel, par exemple (500 ans avant Jésus-Christ) :

« Je ferai sur vous l’aspersion d’une eau pure, et vous serez purifiés ; je vous purifierai de toutes vos souillures et de toutes vos idoles. » (Éz 36.25)

Et au début de l’Évangile de Matthieu, on a un autre prophète qui s’appelle Jean-Baptiste et qui baptisait les gens avec l’eau du fleuve du Jourdain comme symbole de la purification des péchés. Il disait aux gens : « Venez, reconnaissez que vous êtes des pécheurs, et recevez ce baptême comme signe du renouveau que Dieu vous présente dans sa grâce. » (cf. Mt 3.5-12)

Mais aucun parent juif pieux, qui connaissait un petit peu sa religion, n’aurait jamais dit à ses enfants : « Attendez-moi sur les berges du fleuve pendant que je vais aller me faire baptiser par le prophète. » Depuis toujours, les enfants étaient inclus dans la vie de la communauté d’Israël. « Tous ont été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer », dit l’apôtre Paul en se référant à la sortie d’Égypte (1 Co 10.2). Dieu avait dit à Abraham (1800 ans avant Jésus-Christ) : « Je serai ton Dieu et celui de tes descendants après toi », au moment où Dieu institue le rite de la circoncision comme signe de cette relation entre lui et son peuple, et gage du salut qu’il promet à tous ceux qui placent leur foi en lui (cf. Rm 4.11). Mais ce rite sacré était destiné non seulement aux hommes adultes qui rejoignaient le peuple d’Israël en tant qu’adultes, mais aussi aux bébés garçons qui naissaient dans le peuple.

Bref, lorsque Jésus institue le baptême chrétien, dans le texte qu’on a lu ce matin, rien n’indique que dorénavant, les enfants de la communauté du messie ont un statut différent de celui qu’ils ont toujours eu. Les premiers destinataires de ce texte auraient naturellement compris que le baptême chrétien institué par Jésus était destiné à toutes les personnes qui sont incorporées dans la communauté du messie, qu’est l’Église, quel que soit leur âge au moment où ces personnes intègrent la communauté.

Bref, pourquoi est-ce qu’on fait un truc aussi bizarre qu’administrer le baptême à des petits bébés, dans notre Église ? Parce qu’on croit fermement que c’est ce que veut notre chef, Jésus-Christ. L’Église Lyon Gerland a reçu pour instructions de la part de Jésus de rassembler des gens de toutes les nations et de leur enseigner la foi, et nos enfants font partie de ces gens. Ils sont disciples – c’est-à-dire élèves de Jésus – et ils ont droit au signe de leur appartenance à la communauté de Jésus, et on va leur enseigner ses voies dès leur plus jeune âge, on va leur apprendre à prier et à lire la Bible, et on va prier de tout notre cœur que par ces moyens de grâce, le Saint-Esprit va faire grandir en eux leur amour et leur foi en Jésus.

3/ La présence du chef de l’Église (v. 20)

Ce qui nous amène au dernier point. Troisièmement et dernièrement : la présence du chef de l’Église. Ce qu’on voit maintenant dans le texte, et c’est vraiment la toute fin de l’Évangile selon Matthieu, c’est que l’Église Lyon Gerland a le privilège d’être accompagnée dans sa mission par celui qui a le pouvoir de l’accomplir.

C’est une parole merveilleuse que prononce Jésus à la fin du verset 20.

« Voici : je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

Ça peut sembler un peu curieux, parce qu’en fait, Jésus est sur le point de partir quand il dit ça. Comme on l’a vu, il va monter au ciel s’asseoir sur le trône de l’univers, à la droite de Dieu le Père. Mais justement, il s’en va pour pouvoir être avec les croyants tous les jours. Parce que Jésus ici, fait allusion d’une part à sa nature divine selon laquelle il est omniprésent (corporellement, selon sa nature humaine, il ne peut pas être présent partout, mais selon sa nature divine, il est présent partout en Esprit). Et d’autre part, il fait allusion justement au déversement du Saint-Esprit qui est promis aux croyants dans le cadre de ce qu’on appelle « la nouvelle alliance ». C’est-à-dire dans cette relation entre les croyants et Dieu, qui est établie de manière optimale maintenant que Jésus est mort et ressuscité, eh bien dans cette « nouvelle alliance », ou cette « alliance renouvelée » dont les dispositions ont été rendues encore meilleures – maintenant, le Saint-Esprit lui-même vient demeurer pleinement dans le cœur de ceux qui ont la foi en Jésus.

Puisque le Père est Dieu, et le Fils est Dieu, et le Saint-Esprit est Dieu, eh bien en recevant le Saint-Esprit qui nous donne la foi et qui régénère nos cœur et qui nous donne la vie nouvelle, on entre en communion avec Dieu tout entier, si j’ose dire ! La présence de l’Esprit, c’est la présence de Jésus, c’est la présence du Père. Jésus est réellement présent avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde, par son Esprit qui habite en nous et qui habite en l’Église.

Vous savez, de nos jours on peut faire un truc qu’on ne pouvait pas faire jusqu’à relativement récemment dans l’histoire. On peut envoyer un texto ou un WhatsApp à quelqu’un pour lui dire en temps réel : « Je suis de tout cœur avec toi ». Ça vous est déjà arrivé de faire ça pour quelqu’un qui traversait des difficultés ? Ou pour quelqu’un qui allait passer un examen, ou subir une opération ? Vous savez que le jour est venu, et même l’heure, et vous pensez à la personne, peut-être que vous priez pour elle, et quelques minutes avant l’heure fatidique, vous lui envoyez ce petit mot : « Courage, je pense à toi dans mes prières, je suis de tout cœur avec toi ! » De nos jours, ça semble presque banal !

Mais quand Jésus dit qu’il est avec nous tous les jours, ça n’existait pas, les textos ! Il n’y avait aucun moyen à l’époque de faire connaître sa solidarité à quelqu’un en temps réel. Et d’ailleurs dans pratiquement toute l’histoire jusqu’à l’invention du téléphone (par un Écossais à la fin du 19ème siècle) !

Jésus ne ment pas. Et il est réellement présent avec nous si on est croyant, et il est réellement présent dans l’Église qui est son corps (d’après les Écritures). Et en faisant cette promesse juste après avoir donné à l’Église ses ordres de mission, Jésus sous-entend qu’il est présent avec son Église spécialement dans la poursuite de sa mission. On peut obéir aux instructions de Jésus avec cette assurance que Jésus est avec nous.

Jésus est spécialement présent dans l’administration des sacrements qu’il a institués. En administrant le baptême, Jésus est spécialement présent. Il est présent par son Esprit et il nous communique sa grâce en nous la représentant sous la forme du baptême, en nous rappelant le salut qu’il nous présente en lui-même, en nous signifiant, par le déversement de l’eau, à la fois la purification des péchés et le don du Saint-Esprit qui sont offerts à tous ceux qui placent leur foi en Jésus – et il fortifie notre foi en nous confirmant la fiabilité de ses promesses. Il nous dit : « Voici assurément le salut que je vous présente, à vous, ma communauté, mon corps, ma famille. Je vous le garantis par ce signe, et je vous invite seulement à répondre par la foi ! J’ai tout fait pour vous, reposez-vous en moi, fiez-vous à moi, recevez-moi, et vous trouverez du repos pour vos âmes. »

Et Jésus est spécialement présent dans la prédication de sa Parole et dans tout l’enseignement qui est réalisé par l’Église et dans l’Église. La Parole de Dieu est appelée « l’épée de l’Esprit », et elle est représentée par une épée à double tranchant qui sort de la bouche de Jésus, dans les Écritures. Jésus est spécialement présent quand on explique la bonne nouvelle de sa mort et de sa résurrection à des non-croyants dans notre entourage ou dans la rue. Il est spécialement présent quand on lit la Bible. Il est spécialement présent dans le culte, et dans la lecture publique des Écritures, et dans la prédication le dimanche matin.

Et Jésus a promis qu’il agirait par le moyen de sa Parole et par la puissance de son Saint-Esprit, justement pour faire naître la foi dans le cœur des enfants de Dieu. On peut annoncer l’Évangile avec une grande assurance aux gens autour de nous, même aux non-croyants les plus endurcis, parce que Dieu appellera assurément à lui ceux qu’il a choisis, et aucun de ceux-là ne pourra lui résister !

On peut et on doit expliquer les enseignements de la Bible à nos enfants, avec une grande assurance, parce que c’est la Parole de leur Dieu, et que Dieu va aussi utiliser cette Parole avec puissance pour faire naître et grandir la foi dans le cœur de nos enfants. Certes, ça ne veut pas dire que tous nos enfants vont s’attacher à Dieu – comme dit l’apôtre Paul dans un autre passage : « afin que le dessein de Dieu demeure selon l’élection qui dépend non des œuvres mais de celui qui appelle » (Rm 9.11). Mais il nous appartient, à nous, parents chrétiens, d’administrer fidèlement sa Parole à nos enfants, parce que nos enfants ne sont pas des intrus dans la communauté chrétienne, de la même façon qu’il appartient aux pasteurs d’administrer fidèlement la Parole de Dieu à tous les membres de la communauté, même si certains, selon le dessein de Dieu, ne vont pas persévérer dans la foi.

Néanmoins, on peut s’attendre – et on devrait s’attendre – par la foi, à ce que les moyens de grâce que Dieu a ordonnés soient efficaces. Oui, les sacrements, la prière, l’enseignement de la Bible, la communion fraternelle (c’est-à-dire les échanges qu’on peut avoir les uns avec les autres en tant que membres de la communauté chrétienne) – tout ça, Dieu l’a voulu pour notre bien spirituel et pour le bien spirituel de nos enfants. Et de façon ordinaire, oui, Dieu va communiquer sa grâce avec efficacité et puissance, alors soyons encouragés !

L’Église Lyon Gerland a le privilège d’être accompagnée dans sa mission par celui qui a le pouvoir de l’accomplir. C’était le dernier point.

Et maintenant, pour conclure rapidement.

Toute la leçon de ce texte, c’était quoi, finalement ? Eh bien on se demandait au début qu’est-ce que l’Église chrétienne était censée faire. Qu’est-ce qui doit déterminer ses pratiques ? Pourquoi est-ce qu’on trouve dans l’Église chrétienne des trucs un peu bizarres, comme par exemple dans notre Église, le fait d’organiser une cérémonie rituelle où on va mouiller un bébé. D’habitude quand un bébé est mouillé, ce n’est pas bon signe : ça veut peut-être dire que sa couche a débordé !

Mais ce qu’on a vu ce matin, c’est que l’Église chrétienne, et donc notre Église, l’Église Lyon Gerland doit obéir à celui qui en est le fondateur et le chef, à savoir Jésus-Christ. Si Jésus nous a dit de faire quelque chose en tant qu’Église, on doit le faire, peu importe si ça a l’air bizarre – et s’il ne nous a pas dit de faire quelque chose en tant qu’Église, on ne doit pas le faire, même si on aurait très envie de le faire !

On a vu que Jésus, qui est à la tête de l’Église chrétienne, est littéralement le maître de l’univers. Il va revenir un jour, et ce jour-là il va juger le monde entier, parce que le monde entier est déjà sous sa juridiction. Est-ce que vous, ce matin, vous êtes prêt à comparaître devant lui ? Vous pouvez être prêt simplement en plaçant votre confiance en lui. Parce qu’il est lui-même mort sur la croix pour prendre sur lui la peine des péchés de tous les croyants, de façon à ce qu’on puisse être pardonné, et déclaré juste aux yeux de Dieu. Jésus est ressuscité en vainqueur sur le mal et sur la mort, et donc si votre foi n’est pas encore en lui et en lui seul, je vous exhorte (et vous supplie même) de placer votre confiance en lui dès maintenant. En vous reposant dorénavant sur lui, eh bien vous allez pouvoir attendre le jour de son retour et le jour du jugement sans aucune crainte. Vous allez pouvoir avancer dans la vie avec l’assurance d’être un enfant bien-aimé de Dieu, pour toujours, et qu’il vous accueillera dans son paradis !

On a vu aussi que Jésus avait donné ses ordres de mission à l’Église. À nous maintenant, si on est chrétien, si on est dans la communauté des chrétiens – à nous de nous rappeler perpétuellement quelle est la grande mission de l’Église. On existe « pour le rassemblement et le perfectionnement des saints », comme le dit notre confession de foi. C’est-à-dire pour annoncer la bonne nouvelle de Jésus au plus grand nombre, et pour incorporer dans la communauté toutes les personnes, adultes et enfants, qui sont réputées disciples de Jésus, élèves de son école. On doit entériner leur appartenance à la communauté par le baptême, et on doit leur enseigner les voies de Dieu.

Et on a vu que Jésus était réellement avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde. Le maître de l’univers agit parmi nous. Il est spécialement présent, maintenant-même, au moment où je vous parle. Et il sera spécialement présent au moment où on va administrer le baptême à Abel dans quelques minutes. Non seulement il est présent, mais il agit. Il agit réellement ! C’est lui qui accomplit son projet à travers nous, par les moyens qu’il a ordonnés.

Jésus, qui est Dieu de toute éternité, est né parmi nous, il a grandi, il a enseigné les voies de Dieu, il a souffert, il est mort sur la croix, il est ressuscité le troisième jour, et il est monté au ciel, il s’est assis à la droite de Dieu, le Père tout-puissant, et il viendra de là pour juger les vivants et les morts. Et maintenant ?

« Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. »

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