Des enjeux de la plus haute importance !

Par Alexandre Sarranle 14 juin 2009

Introduction

Est-ce que vous avez conscience de l’importance des enjeux du témoignage chrétien ? Voici l’histoire de deux personnes qui entreprennent un jour de gravir une montagne. Le nom de cette montagne : le Mont Blanc. La première personne a toujours vécu dans les Monts du Lyonnais et n’a jamais entendu parler du Mont Blanc ; pour elle, une montagne, c’est une colline verdoyante qui culmine à 950 m d’altitude, et dont on peut s’approcher jusqu’à cinquante mètres du sommet en voiture. Alors imaginez, lorsque cette personne commence à mettre le pied sur le sentier rocailleux du Mont Blanc, et à voir scintiller au loin le vaste glacier avec ses crevasses sombres et menaçantes, et à mesurer la distance vertigineuse qui la sépare du sommet, elle a vite fait de faire demi-tour et de retourner dans ses Monts du Lyonnais beaucoup plus accueillants et confortables. Mais l’autre personne, quant à elle, a beaucoup entendu parler du Mont Blanc ; elle sait que le Mont Blanc, c’est le point culminant de l’Europe ; elle sait que l’expédition pour accéder au sommet est difficile, mais que ça vaut le coup, et que sa vie même pourrait en être changée. Alors, quand elle commence à mettre le pied sur le même sentier rocailleux, et à voir scintiller au loin le même vaste glacier avec ses mêmes crevasses sombres et menaçantes, et à mesurer la même distance vertigineuse qui la sépare du sommet, elle va continuer. Elle va continuer, parce qu’elle a conscience de l’enjeu. Ma question ce matin est la suivante : est-ce que vous avez conscience des enjeux de la vocation chrétienne ? Le message chrétien, l’invitation de l’Évangile, se présente devant vous comme cette montagne majestueuse ; mais est-ce que vous avez conscience de l’importance des enjeux de cette expédition ? J’ose espérer que si vous êtes présents ce matin, cela veut dire que vous n’êtes pas complètement indifférent au message de l’Évangile. Peut-être même que vous avez commencé à mettre le pied sur le sentier rocailleux. Vous levez la tête, et vous voyez le glacier, les crevasses, la distance qui vous sépare du sommet… et qu’est-ce que vous ressentez ? Comment réagissez-vous lorsque vous vous rendez compte que vous allez au-devant de réels défis, de réels dangers, et de réelles difficultés, des choses qui n’ont rien à voir avec vos montagnes des Monts du Lyonnais ? Découragement ? Paralysie ? Capitulation ? À travers le texte que nous avons lu ce matin, l’auteur veut nous faire retenir une idée toute simple, mais qui a de nombreuses conséquences, et qui a le potentiel de transformer, que-dis-je, de bouleverser notre rapport à la vocation que Dieu nous adresse dans l’Évangile ; cette idée est la suivante : les enjeux du message chrétien sont de la plus haute importance. Voyons comment le texte nous en parle.

Les enjeux expliquent l’opposition acharnée

La première chose que fait l’auteur, c’est d’insister sur l’acharnement dont les détracteurs de Paul font preuve. Paul est emprisonné depuis deux ans. Dès qu’il y a un changement de gouverneur, les Juifs saisissent la première occasion pour porter de nouveau plainte contre Paul et ils préparent un guet-apens pour le faire mourir. Ce n’était pas suffisant de le laisser en prison ! Dès que Paul comparaît à Césarée, les Juifs le pressent et portent contre de lui de nombreuses accusations, graves et fausses. Une opposition violente, irrationnelle, acharnée.

L’auteur raconte tout ça pour nous montrer que s’il y a un tel acharnement, à la limite de l’irrationnel, c’est qu’il doit bien y avoir quelque chose qui dérange, et qui dérange beaucoup. Il n’y a pas de fumée sans feu. L’auteur est en train de nous dire, « qu’est-ce que ça doit être, les enjeux du message chrétien, pour qu’il y ait une telle opposition » ! Vendredi soir, je suis passé en voiture devant la Halle Tony Garnier, et il y avait plein de gens excités sur le trottoir qui faisaient la queue, et au moins une douzaine de camionnettes à kebab qui s’installaient dans la rue, et je me suis dit, « qu’est-ce qui doit y avoir, comme concert à la Halle ce soir, pour qu’il y ait toutes ces camionnettes à kebab » ! C’était Mylène Farmer. De la même façon, on se ballade en ville parfois, et l’on voit une demi-douzaine de camionnettes de CRS garés sur le bord de la route, et on se dit, « mince, il doit se passer quelque chose d’important pour qu’il y ait tout ce déploiement de CRS » ! Il n’y a pas de fumée sans feu.

Dans ce texte, l’auteur est en train de pointer du doigt la fumée, le déploiement de CRS, les camionnettes de kébab, pour nous faire dire, « mais qu’est-ce que ça doit être, les enjeux du message chrétien, pour qu’il y ait un tel remue-ménage » ! Les enjeux du message chrétien, proclamé par Paul, sont tels que l’opposition à ce message va jusqu’à un acharnement irrationnel et sans fin (cf. le complot dans Ac 23). La Bible présente cela comme une réalité normale ; Jésus a dit : Si le monde a de la haine pour vous, sachez qu’il m’a haï avant vous (Jn 15.18). Cela veut dire que le message chrétien, dans un certain sens, ce n’est pas la promesse d’une vie quotidienne plus facile, mais la promesse d’une vie quotidienne plus difficile ! Pourquoi ? Parce que les enjeux de ce message sont de la plus haute importance : Car nous n’avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les principautés, contre les pouvoirs, contre les dominateurs des ténèbres d’ici-bas, contre les esprits du mal dans les lieux célestes (Ép 6.12).

Dans un premier temps, l’auteur pointe donc du doigt cet acharnement irrationnel contre le témoignage de Paul, pour nous faire prendre conscience de l’importance des enjeux du message chrétien. L’opposition à ce message est normale, à cause des enjeux. La Bible nous invite donc à une grande lucidité, à une grande vigilance, et à ne pas perdre courage face aux épreuves qui sont inévitables : Ne soyez pas surpris de la fournaise qui sévit parmi vous pour vous éprouver, comme s’il vous arrivait quelque chose d’étrange. Au contraire, réjouissez-vous de participer aux souffrances du Christ, afin de vous réjouir aussi avec allégresse, lors de la révélation de sa gloire. Si vous êtes outragés pour le nom de Christ, vous êtes heureux, car l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu repose sur vous (1 Pi 4.12-14) ! La Bible nous invite d’autant plus à cette lucidité, que le monde, lui, n’a pas conscience de l’importance des enjeux du message chrétien. C’est ce que le texte va nous montrer dans un deuxième temps.

Tout le monde n’a pas conscience de ces enjeux

L’auteur, en effet, va nous parler de l’attitude de Festus au milieu de tout ce remue-ménage. Le texte nous présente Festus comme un gouverneur compétent, tout-à-fait dédié à sa mission, attentif aux demandes de la population qu’il est censé gouverner (v. 1, 6). En même temps, il ne semble pas mesurer la gravité de la situation qui oppose Paul aux autorités juives. Il semble assez flegmatique et désinvolte (v. 4-5), en tout cas inconscient des enjeux de ce qui se passe : c’est pourquoi il cherche une voie médiane (v. 5 / v. 9), il fait une proposition à Paul tout-à-fait déraisonnable (v. 9), et il finit par hausser les épaules, en quelque sorte, face à la demande de Paul (v. 12), comme s’il était dépassé par les événements. On voit que Festus ne comprend pas pourquoi on fait tout un fromage de cette situation.

Est-ce que vous savez ce qui s’est passé le 12 juillet 1998 ? Le 12 juillet 1998, l’équipe de France de football a joué contre le Brésil en finale de la coupe du monde. Un événement majeur, avec des enjeux importants pour tous les amateurs de foot ! Je peux vous dire qu’au Brésil, aussi bien qu’en France, ce jour-là il y avait de la tension chez les supporters. Les écrans géants ont fait leur apparition dans toutes les grandes villes de France. Les gens ont sorti leurs maillots de foot, leurs drapeaux, leur maquillage bleu-blanc-rouge, etc. Tout ça pourquoi ? Parce que les enjeux de ce match étaient de la plus haute importance. Mais il y a aussi toute une frange de la population qui ne s’intéresse pas au foot et qui, ce jour-là, ne pouvait pas comprendre tout le tralala que l’on faisait autour de ce match. Ce soir-là ils ont peut-être regardé un feuilleton à la télé et ils se sont couchés tôt. Parce que, en ce qui les concernait, ils n’avaient pas conscience des enjeux de l’événement.

Festus est dans le même cas. Il n’a pas conscience des enjeux du message chrétien qui est mis en jugement devant son tribunal. C’est pourquoi, malgré toute sa compétence, il va faire preuve d’un peu de naïveté en essayant de satisfaire tout le monde en même temps. Cela, c’est le discours normal des gens qui n’ont pas conscience des enjeux du message chrétien : « Il faut faire de la place pour toutes les religions ! Tous les chemins mènent à Dieu ! Vive le pluralisme » ! Mais la Bible ne présente pas la foi chrétienne comme juste un choix de vie personnel et privé, une religion possible parmi d’autres, ou une simple facette de la vérité. Jésus condamne le pluralisme et toutes les autres religions du monde et de l’histoire, lorsqu’il dit : Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi (Jn 14.6).

L’auteur est donc en train de nous rappeler que le monde auquel notre témoignage s’adresse, ceux qui sont les destinataires du message chrétien, n’ont pas conscience de l’importance des enjeux de ce message. Et le danger, c’est que nous finissions par croire à leur indifférence, plutôt qu’aux enjeux de l’Évangile. Le résultat, ce sont des chrétiens qui ne dérangent personne ; des chrétiens qui se couchent tôt alors qu’il y a une finale de la coupe du monde ; des chrétiens tièdes qui acceptent la voie médiane, la voie diplomatique, et dont le témoignage consiste à donner l’impression que la foi chrétienne est une tradition respectable parmi d’autres. Mais ce n’est pas du tout le comportement de Paul dans ce texte. On va voir que Paul, lui, conscient qu’il est de l’importance des enjeux du message chrétien, ne se satisfait pas du compromis, mais veut pousser le bouchon plus loin et provoquer le positionnement.

Intégrer les enjeux dans la vocation chrétienne

Regardons Paul en effet. Face à l’acharnement de ses détracteurs, il défend vigoureusement son témoignage, de façon systématique, répétée, avec insistance et transparence (v. 8). Paul n’accepte pas le compromis (injuste) que lui propose Festus, sachant bien que cela tournerait à son désavantage (v. 10). En toute transparence, et très sûr de lui, Paul demande un procès et un jugement. Il accepte qu’on le fasse mourir s’il a commis des torts dignes de mort (v. 11). Mais il n’accepte pas le compromis. Finalement, devant la tergiversation de Festus, Paul en appelle à une cour supérieure, à la « cour suprême », à César lui-même.

Qu’est-ce qu’il est en train de faire, Paul ? Il est en train de pousser le bouchon le plus loin possible parce qu’il a conscience des enjeux du message chrétien. Il y a des gens qui passent le Bac en ce moment. Ils se retrouvent devant leur copie, avec dix questions auxquelles ils doivent répondre. Combien de personnes vont répondre aux cinq premières et puis s’arrêter là parce que tout ce qu’il leur faut c’est la moyenne ? Aucune ! Pourquoi ? Parce que tous ces étudiants ont conscience de l’importance de l’enjeu, et ils veulent faire du mieux possible. Il en va de tout leur avenir ! Paul de même : on lui propose de s’arrêter après la cinquième question, mais il refuse. Il a conscience de l’importance des enjeux du message chrétien, et il compte aller jusqu’au bout.

Malgré l’opposition acharnée, et irrationnelle de ses détracteurs, et malgré l’indifférence de Festus, Paul reste convaincu que le message chrétien, c’est l’information, et l’invitation, la plus importante qu’aucun homme pourra jamais recevoir. Paul reste convaincu que ce qui s’est passé autour de l’an 33, lorsque Jésus a été crucifié, qu’il est ressuscité, et qu’il est monté à la droite de Dieu le Père, ce sont les événements les plus importants de toute l’histoire du monde. Paul reste convaincu que toute l’humanité est concernée par le message de l’Évangile. Paul reste convaincu qu’il n’y a pas d’autre moyen pour l’homme de trouver le sens de sa vie, l’utilité de son existence et son bonheur éternel autrement qu’en se confiant tout entier en Jésus-Christ, parce que Jésus a porté sur lui, à la croix, tout ce qui nous séparait de Dieu, tout ce qui gâchait notre condition humaine, tout ce qui nous rendait ignorants et malheureux. Paul reste convaincu que le message de l’Évangile a le potentiel non seulement de bouleverser des vies tout entières, mais des familles tout entières, des communautés tout entières, et même des pays tout entiers.

Conclusion

Voilà pourquoi Paul pousse le bouchon plus loin, pourquoi il compte aller jusqu’au bout. Parce que les enjeux sont de taille. Parce que les enjeux du message chrétien sont de la plus haute importance. Mais est-ce que nous mesurons l’importance de ces enjeux ? Je ne sais pas où vous en êtes dans votre cheminement personnel. Je ne sais pas si, au cours de cette expédition au Mont Blanc, vous êtes sur le chemin rocailleux, ou dans les alpages, ou sur le glacier. Peut-être que vous n’en êtes même pas là, et que cette expédition n’est encore pour vous qu’un projet auquel vous commencez à vous intéresser. Quel que soit votre rapport au message chrétien, et à l’invitation de l’Évangile, le texte de ce matin vous invite à retenir une leçon très simple mais lourde en conséquences : les enjeux sont de taille. Les enjeux sont de la plus haute importance. C’est une invitation à la lucidité, parce que les enjeux sont tels que la vie chrétienne, c’est loin d’être quelque chose d’anodin, mais c’est un véritable défi. C’est une invitation à la vigilance, parce que les enjeux sont tels, que l’opposition viendra, et parfois nous surprendra. C’est une invitation au courage, parce que les enjeux sont tels, que le jeu en vaut bien la chandelle ! Et c’est une invitation à la persévérance, au zèle, et à une sainte obstination, car les enjeux sont tels, que nous ne devons pas nous laisser endormir par l’indifférence générale, mais bien plutôt chercher à pousser le bouchon toujours plus loin et à proclamer le message de l’Évangile avec vigueur et insistance. Dieu nous adresse un peu le même appel que celui qu’il a adressé au prophète Ézéchiel, qu’il a envoyé vers un peuple aveugle et indifférent, en lui disant : Voici que j’endurcis ta face, pour que tu l’oppose à leur face ; j’endurcis ton front, pour que tu l’opposes à leur front. […] Tu leur parleras et, qu’ils écoutent ou qu’ils ne prennent pas garde, tu leur diras : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel (Ézéchiel 3.8, 11).

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