La grâce irrésistible

Par Denis Blumle 23 juin 2019

Jonah nous a annoncé la mauvaise nouvelle de la dépravation totale de l’humanité, sa corruption radicale. Alex nous a expliqué que le Fils est venu à la croix régler le problème du péché, en tout cas de ceux que le Père a choisi de toute éternité de sauver. Il me revient à moi d’énoncer de quelle manière la grâce de Dieu s’applique à nos vies, comment un homme pécheur et par nature éloigné de Dieu vient à tourner son cœur vers Dieu pour recevoir de lui la justification, la rédemption, le pardon des péchés. Il s’agit donc de la question de la conversion.

Les 5 doctrines que nous étudions ont été formalisés dans l’histoire de la réforme lors d’un synode qui a eu lieu au Pays-Bas en 1618-1619 à Dordrecht. L’intitulé exact du 4e point du canon de Dordrecht, n’était pas la grâce irrésistible, mais la conversion à Dieu.

Nous allons partir d’un verset : Romains 8.29-30 : « Car ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son Fils fût le premier-né entre plusieurs frères. Et ceux qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés ; et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés ; et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés ».

Vous voyez qu’il y a un enchaînement logique qui nous est donné dans ce verset, un ordre précis dans lequel nous recevons les bénédictions du salut. En premier Dieu choisis les élus, c’est la prédestination et l’élection inconditionnelle de Dieu, et ensuite il les appelle, avant de les justifier.

Il nous a prédestiné avant la fondation du monde à être ses enfants et à devenir conforme à l’image de son Fils, et lorsqu’il met à exécution de manière concrète son dessein, Dieu appelle ses enfants.

En quoi consiste l’appel de Dieu ?

On peut déjà noter que l’appel est un acte de Dieu, et plus précisément un acte de Dieu le Père, parce que c’est lui qui destine les hommes « à devenir semblable à l’image de son fils » (Romains 8.29).

On distingue souvent deux types d’appel :

- L’appel général est l’appel universel adressé par Dieu à tous les humains, et que certains rejettent. Il correspond à la présentation du salut et du message de l’Évangile, l’invitation qui est faite à tous les hommes. Matthieu 24.14 : « Cette bonne nouvelle du royaume sera prêchée dans le monde entier, pour servir de témoignage à toutes les nations. ». C’est un appel universel.

Quand le geôlier demande « que faut-il que je fasse pour être sauvé ? Paul et Silas répondirent : Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé » (Actes 16.31). Dieu offre sa grâce à tous, et l’homme a la responsabilité de répondre à cet appel, qui est lui est adressé.

1 Corinthiens 1.23-24 nous dit : « Nous prêchons Christ crucifié ; scandale pour les Juifs et folie pour les païens, mais puissance de Dieu et sagesse de Dieu pour ceux qui sont appelés, tant Juifs que Grecs »

La prédication de l’Évangile, qui est l’appel général de Dieu, est adressée à toute l’humanité, mais cet appel général est inefficace. Il est inefficace dans le sens qu’il ne produit pas nécessairement la conversion. Il n’y pas 100% de réussite. Il ne suffit pas de prêcher Christ crucifié pour que ce message soit accepté. Et dans l’ensemble, ce message est rejeté, et est qualifié de folie. C’est un scandale pour les juifs et une folie pour les païens. Et vous avez probablement tous déjà fait cette expérience d’annoncer la bonne nouvelle du Salut, de Jésus Christ crucifié pour nos péchés. Et la personne à qui vous annoncez cette bonne nouvelle qui a changé votre propre vie, vous répond : non merci, ou que c’est trop beau pour être vraie, ou alors il se moque de vous. Bref, il rejette personnellement ce message.

L’appel de l’Évangile qui attend une réponse de notre part est souvent rejeté par les humains. On peut donc dire que l’appel général est inefficace, dans le sens qu’il n’est pas suffisant pour produire la repentance. Il est pour autant nécessaire. La proclamation de l’Évangile est nécessaire, parce que sans cette proclamation on ne peut pas être sauvé : « Comment croiront-ils en celui dont ils n’ont pas entendu parler ? » (Romains 10.14). Il faut déjà entendre le message de l’Évangile pour pouvoir y répondre. Mais cet appel n’est pas suffisant. La preuve, certains le rejettent.

C’est pour cela qu’on le distingue de l’appel efficace.

- L’appel efficace

Dans le verset de 1 Corinthiens 1.23-24 : qui sont ceux qui reconnaissent que la prédication de Christ crucifié est la puissance et la sagesse de Dieu ? « Nous prêchons Christ crucifié ; […] puissance de Dieu et sagesse de Dieu pour ceux qui sont appelés ».

Pour ceux qui sont appelés, ce message n’est pas une folie mais il est reçu comme une sagesse et comme la puissance de Dieu. Qui sont donc ces appelés ? Ce sont les élus, ceux que Dieu a choisi de sauver et qui répondent favorablement à l’appel de Dieu.

L’appel des élus, on le qualifie d’appel efficace parce qu’il produit efficacement la régénération, la repentance, et la foi. C’est un appel qui est individuel, irrésistible et donc efficace, puisqu’il s’inscrit dans le cadre de l’élection. On lui donne le nom d’appel efficace pour le distinguer de l’appel général.  Ceux que Dieu a appelé au salut (les élus), ne voient plus la croix comme une folie, mais comme la puissance et la sagesse de Dieu.

L’appel efficace c’est le miracle que Dieu opère lorsqu’il ouvre les yeux de ces élus. C’est ça la grâce irrésistible. L’homme est par nature aveuglé mais Dieu peut lui rendre la vue. C’est ce qu’a vécu Saul de Tarse sur le chemin de Damas, c’est ce qu’a vécu Lydie en Actes 16.14 : « Le Seigneur lui ouvrit le cœur, pour qu'elle s’attache à ce que disait Paul. » Et vous notez c’est Dieu qui lui a ouvert le cœur !

Et c’est parce que l’on croit que c’est Dieu qui ouvre les cœurs que nous prions pour les perdus et que nous évangélisons avec confiance. La prière est extrêmement importante pour une évangélisation efficace, parce que si Dieu n’agissait pas lui-même, s’il n’avait pas la capacité d’agir lui-même dans le cœur des humains, pour rendre la proclamation de l’Évangile efficace, il ne pourrait pas y avoir de réponse salvatrice de leur part.

Si l’on croyait que l’homme avait un libre arbitre en ce qui concerne son salut, et que c’était la décision autonome et parfaitement libre de l’homme qui définirait sa destinée éternelle, Dieu ne serait plus totalement souverain et serait contraint et limité par la volonté humaine, et il ne pourrait donc pas exaucer notre prière de convertir Jacques ou Alceste. Il serait empêché par la liberté humaine.

Voilà comment Grudem définit l’appel efficace dans son ouvrage de théologie systématique : « C’est un acte de Dieu le Père par lequel, au moyen de la proclamation de l’Évangile, il appelle les hommes à Lui d’une manière telle qu’ils répondent par la foi qui sauve. » On reviendra plus loin sur la place de la foi.

La Bible utilise souvent le mot « appelé » et on constate en fait qu’il est surtout employé à propos de ceux qui seront sauvés. En Romains 8.30, ceux qu’il a appelé ont aussi été justifié. Les appelés sont ensuite justifiés. Ils sont déclarés justes par Dieu, c’est-à-dire qu’ils sont pardonnés et qu’ils sont donc sauvés.

Vous pouvez donc retenir que l’appel dans la Bible correspond à l’appel efficace que l’on vient de définir, et qu’il faut le distinguer de la proclamation générale de l’Évangile.

Prenons une image de la parole de Dieu pour illustrer ce point. En Jean 10 Jésus se présente comme un berger et les élus sont présentés comme des brebis qu’il a racheté au prix de sa vie. Et Jésus nous dit que lorsqu’une brebis entend sa voix, elle le suit. Si c’est une brebis (et pas un loup ou un bouc), elle le suivra nécessairement. Et si elle le suit c’est parce qu’elle est une brebis.

Dans une autre parabole en Luc 15. 4-6, Jésus se présente comme celui qui va lui-même chercher la brebis égarée. Il n’attend pas que la brebis revienne toute seule à la bergerie. Il va lui-même la chercher pour la ramener. C’est une illustration de cet appel efficace, qui est une œuvre de Dieu et de Dieu seul, qui met tout en place pour que ces élus répondent favorablement à son appel.

L’homme peut-il résister à cet appel ?

Tout dépend de quel appel on parle.

L’homme peut résister à l’appel général de Dieu. C’est ce qu’il fait d’ailleurs par nature : il résiste à Dieu et au Saint-Esprit. Et il le fait très bien ! Par nature l’homme a le cou raide, le cœur endurcis, et il s’oppose à Dieu (Actes 7.51), mais Dieu dans sa souveraineté peut vaincre toute résistance humaine s’il le désire. Notre Dieu « fait ce qu’il veut » (Psaumes 115.3).

Le Saint-Esprit peut triompher de n’importe quelle résistance, et c’est ce qu’il fait envers les élus. Un élu ne peut pas résister à l’appel efficace. L’appel efficace fonctionne à 100%.

On ne peut pas résister à la volonté de Dieu et c’est ce que dit Paul en Romains 9.19-21 : « Tu me diras: Pourquoi blâme-t-il encore ? Car qui est-ce qui résiste à sa volonté ? Ô homme, toi plutôt, qui es-tu pour contester avec Dieu ? Le vase d'argile dira-t-il à celui qui l'a formé : Pourquoi m'as-tu fait ainsi ? Le potier n'est-il pas maître de l'argile, pour faire avec la même masse un vase d'honneur et un vase d'un usage vil ? »

Dieu est plus fort que l’homme et agit de manière irrésistible. Il brise sa résistance. Lui-seul, dans sa souveraineté absolue peut venir à bout de la rébellion de notre cœur pour nous amener à croire en Jésus Christ, afin d’être sauvé. Si la doctrine de la corruption totale est vraie, (y compris corruption de notre esprit et de notre volonté), il ne peut y avoir de salut que dans l’intervention efficace de Dieu, autrement appelé grâce irrésistible (car par nature l’homme ne se tourne pas vers Dieu).

Lorsque l’homme entend l’appel de l’Évangile, ce qui l’empêche de venir c’est son péché et son incrédulité. Et il faut une œuvre positive, une œuvre de grâce, pour que l’homme réponde. C’est Dieu qui produit cette œuvre dans le cœur des élus.

Comment Dieu accomplit-il cette œuvre, qu’on appelle la régénération ?

Alex a prêché il y a quelques semaines sur le chapitre 36 d’Ézéchiel qui nous dit au verset 26 [Dieu parle] : « Je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai en vous un esprit nouveau ; j'ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair » C’est Dieu qui est à l’œuvre et pas l’homme. C’est Dieu qui agit et qui donne à l’être humain une vie nouvelle. C’est le Saint Esprit qui régénère le cœur et l’esprit humain. C’est Lui qui produit la nouvelle naissance.

Jonah nous rappelait hier qu’en Éphésiens 2.1 il nous est dit que nous sommes morts par nos offenses et par nos péchés. On est des morts-vivants. Seul Dieu peut nous redonner la vie.

La régénération est en fait un acte secret de Dieu par lequel il communique à l’être humain une vie nouvelle. On l’appelle souvent la nouvelle naissance en référence à la réponse de Jésus à Nicodème en Jean 3. 3-8. Dans la régénération Dieu est le seul acteur, par l’œuvre du Saint-Esprit. On ne peut pas le faire par nous-même.

A propos de ceux à qui Christ a donné le pouvoir de devenir enfant de Dieu Jean 1.13 nous dit (version NBS) : « Ceux–là sont nés, non pas du sang, ni d’une volonté de chair, ni d’une volonté d’homme, mais de Dieu. »

L’analogie de la naissance elle est intéressante parce que nous n’avons pas choisi de naître, et nous sommes également totalement passif dans l’œuvre de régénération et de nouvelle naissance que Dieu accomplit. La naissance qui nous amène à faire partie de la famille de Dieu est irréalisable par la volonté de l’homme. C’est Dieu qui met en nous un cœur et un Esprit nouveau pour que nous puissions croire. 1 Pierre 1.25 :  Il « nous fait naître à une vie nouvelle ».

Le Canon de Dordrecht exprime les choses ainsi (ch.IV, par. 11) : « quand Dieu exécute son bon-plaisir dans les élus, ou quand il les convertit, non seulement il veille à ce que l’Évangile leur soit extérieurement prêché, et il illumine puissamment leur entendement par le Saint-Esprit, afin qu’ils comprennent et discernent droitement les choses qui sont de l’Esprit de Dieu, mais aussi, par l’efficacité de ce même Esprit de régénération, il pénètre jusqu’au tréfonds de l’homme, ouvre le cœur qui est fermé, amollit celui qui est dur, circoncit le prépuce du cœur, introduit de nouvelles qualités dans la volonté, et fait que cette volonté de morte devienne vivante, de mauvaise [devienne] bonne, de non-volontaire [devienne] volontaire, et de revêche [devienne] obéissante ; et il besogne [ = travaille] en elle et la fortifie, afin que comme un bon arbre, elle puisse produire de bons fruits. »

C’est ce qu’il a fait de manière spectaculaire dans la vie de Saul. Saul était un rebelle par excellence, non seulement il résistait à Dieu mais en plus il combattait Dieu en attaquant son église naissante. Et quand Jésus lui est apparu sur le chemin de Damas, il lui a dit ceci « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? Il te serait dur de regimber [= résister] contre les aiguillons. » (Actes 26.14). Un aiguillon était un bâton pointu utilisé pour faire avancer un animal têtu. En persécutant l’église Saul s’opposait aux aiguillons qui allaient finalement le faire avancer dans la bonne direction, vaincre toutes ses résistances et l’amener à la conversion, contre toute attente.

En Jean 6, Jésus est très clair sur le fait que c’est Dieu qui attire à lui les brebis égarés. v 44 : « Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m'a envoyé ne l'attire » et il continu v.64-65 « Mais il en est parmi vous quelques-uns qui ne croient point. Car Jésus savait dès le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient point, et qui était celui qui le livrerait. Et il ajouta : C'est pourquoi je vous ai dit que nul ne peut venir à moi, si cela ne lui a été donné par le Père. »

Venir à Jésus est donc un cadeau qui est donné par le Père, et qui est donné à certains et pas à d’autres. Ce cadeau n’a pas été donné à Judas.

2 Timothée 2.25 : « [le serviteur du Seigneur] doit redresser avec douceur les adversaires, dans l'espérance que Dieu leur donnera la repentance pour arriver à la connaissance de la vérité ».

Comme en Jean 6, la repentance est considérée comme un don de Dieu. Ce n’est pas seulement le salut qui est un cadeau de Dieu, mais aussi toutes les conditions pour que ce salut soit accepté. Dire que Dieu accorde la repentance veut dire que Dieu élimine toutes les résistances de la personne et notamment en lui donnant une vie nouvelle et un esprit régénéré. C’est pour cela qu’on appelle cette œuvre de Dieu la grâce irrésistible. Cela ne veut pas dire que Dieu nous contraint à croire contre notre volonté, mais plutôt qu’il incline notre volonté à croire.

Car « c'est Dieu qui opère en vous le vouloir et le faire selon son dessein bienveillant » (Philippiens 2:13). C’est le Saint Esprit qui régénère le cœur pour produire la repentance et la foi.

Quand Dieu décide d’aller chercher une brebis égarée, rien ne l’arrête, et ça se passe un peu comme dans les films Mission Impossible avec Tom Cruise. Au début du film on propose à l’agent Ethan une mission, et dans la suite du film il met tout en place pour réussir. Malgré les circonstances et les retournements de situation apparents, les ennemis belliqueux, il arrive toujours à ses fins. Quand Dieu s’est fixé une mission, celle d’appeler au salut l’un de ses enfants, de le régénérer par le Saint-Esprit et de l’appeler à la foi, il n’y a aucune résistance suffisante pour s’opposer à ce qu’il fait. Le Saint-Esprit relève cette mission impossible d’amener un être corrompu et orgueilleux, à s’humilier pour accepter le salut que Dieu lui offre par pure grâce.

Tout vient de Dieu et il n’y a rien que l’homme puisse revendiquer comme son apport au salut, indépendamment de l’œuvre de la grâce divine, de sa grâce irrésistible.

Qu’en est-il de la foi ?

Comment vient se situer la foi dans cette histoire ?

La foi n’est-elle pas la contribution de l’homme à son salut ? On serait tenté de l’exprimer ainsi, parce que dans l’expérience humaine, la foi est l’acte volontaire par lequel un individu met sa confiance en Christ pour le pardon de ses péchés. La foi est en quelque sorte la réponse de l’homme à l’appel efficace. Mais nous pouvons répondre à l’appel efficace, seulement parce que Dieu nous a régénéré, qu’il nous a donné un esprit nouveau, un cœur nouveau, une vie nouvelle.

On peut dire que d’un point de vue théologique, la régénération vient avant la foi qui sauve. Dans l’exemple de Lydie en Actes 16.14, le Seigneur lui a d’abord ouvert le cœur, et alors seulement elle a pu comprendre ce que disait Paul, et y répondre par la foi. Mais dans notre expérience il est difficile de dissocier dans le temps régénération et foi. Ce que l’on peut dire c’est que c’est le Saint-Esprit qui nous régénère, qui nous donne une vie nouvelle, qui nous fait naître de Dieu, et comme le dit John Piper dans son livre sur les cinq points du calvinisme : « la première lueur de vie de cet enfant né de nouveau, c’est la foi ». La foi est le résultat de la grâce irrésistible de Dieu. C’est parce qu’on est régénéré qu’on va répondre à l’appel efficace, par la foi. La foi n’est pas seulement une adhésion intellectuelle, une connaissance théorique de ce que Jésus a accompli (les démons aussi connaissent l’Évangile). La foi c’est une confiance personnelle en Jésus pour son salut.

Paul Wells écrit ceci dans un article sur l’offre générale de l’Évangile : « lorsque l’Ecriture exhorte l’homme à se convertir, elle évoque une réponse humaine à l’Évangile, [qui fait] suite [à] la régénération. Cette réponse intervient parce que Dieu régénère ceux pour qui Christ est mort et les rend capables de dire « oui » en restaurant leur liberté. »

Le canon de Dordrecht va encore un peu plus loin en disant ceci (Canon de Dordrecht, chap IV, par 14) : « Ainsi donc la foi est un don de Dieu, non parce qu'elle est offerte par Dieu au libre-arbitre de l'homme, mais parce qu'elle est réellement conférée, inspirée et infusée en l'homme. Non pas même encore parce que Dieu donnerait seulement la puissance de croire, et qu'il attendrait ensuite que la volonté de l'homme y consente, ou croie de fait; mais parce que lui-même opère et le vouloir et le faire […] produit en l'homme et la volonté de croire et la foi elle-même »

L’Écriture atteste que la foi en Jésus-Christ, et le salut par Jésus Christ, est un don gratuit de Dieu : « C'est par grâce en effet que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu » (Éphésiens 2:8), ou encore « Il vous a été fait la grâce de croire en Christ » (Philippiens 1:29), « ayant les regards sur Jésus qui suscite la foi et la mène à la perfection » (Hébreux 12.2).

Et il nous faut accepter cette dualité. La foi est à la fois une réponse humaine nécessaire et volontaire, et un don de Dieu.

Mais il ne faut pas juste attendre les bras croisés que Dieu donne la foi. Il ne faut pas oublier dans notre prédication d’inviter les gens à répondre par la foi au salut qui leur est proposé. « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé » (Actes 16.31). Paul Wells précise d’ailleurs ceci dans son article « Par peur d’arminianisme [qui défend la libre volonté de l’homme], on en vient à dispenser l’homme du devoir de se tourner vers Christ, alors que c’est en se confiant radicalement à Christ que l’on est sauvé et non en se contentant de prendre conscience intellectuellement de la nature de la régénération. Cette prise de conscience est insuffisante, [même] si elle est nécessaire. Ainsi l’orthodoxie peut engendrer la présomption, qui aboutit au formalisme, et nos communautés protestantes se peuplent de « chrétiens » en fait irrégénérés [= non régénérés], qui se croient sauvés parce qu’ils peuvent répéter le Symbole des Apôtres. Or, le salut, c’est de s’abandonner à Christ qui sauve ! Le fantôme de l’arminianisme aurait-il le pouvoir de rendre nos appels à la foi moins pressants que ceux de Christ ? »

Cette dualité est je trouve assez bien illustré par la réponse du père de l’enfant démoniaque que Jésus guérit en Marc 9.24 : « Je crois, viens au secours de mon incrédulité ». Ce qu’il dit à Jésus c’est : Je crois mais j’ai besoin que ce soit toi qui insuffles en moi la foi.

Cette dualité se retrouve aussi en ce qui concerne la sanctification. Après avoir invité les Thessaloniciens à ne pas éteindre le Saint-Esprit, à s’abstenir de tout espèce de mal, Paul conclut en disant « Celui qui vous a appelés est fidèle, et c'est lui qui le fera » 1 Thessaloniciens 5.24. On retrouve cette dualité de notre responsabilité et de la souveraineté de Dieu.

Nous on a du mal à comprendre comment cela s’articule, mais c’est parce que nous sommes limités et nous devons accepter avec obéissance de croire à ce qui nous est révélé par sa Parole. Et Paul Wells de conclure « Dieu donne ce qu’il ordonne dans l’Évangile. » Cette phrase résume bien le paradoxe de la foi.

Conclusion

Nous avons vu que c’est toute la Tri-unité divine qui est à l’œuvre dans le salut :

Nous avons vu l’œuvre du Père dans l’élection, l’œuvre du Fils dans l’expiation, et l’œuvre du Saint-Esprit dans la grâce irrésistible (par la régénération).

Et je laisse pour terminer la parole au canon de Dordrecht : « Et c'est à ce Dieu seul qu'est due, aux siècles des siècles, toute la gloire, celle des moyens, et celle de leur fruit et de leur efficacité salutaire. Amen. » (Canon de Dordrecht, ch IV, par. 17).

Les autres exposés de cette série : 1/ La dépravation totale ; 2/ L'élection inconditionnelle ; 3/ L'expiation limitée ; 5/ La persévérance des saints

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